- AVRIL 2021 -
 
 

 


Le coin des arts martiaux

Deux titres nous arrivent des éditions Budo qui nous remettent en mémoire la précieuse transmission de l’école française en arts martiaux, où beaucoup de disciples sont allés aux sources même de ces disciplines, qui produisent d’intéressants ouvrages. D’abord Jacques Payet qui signe Uchideshi dans les pas du maître. Ici le maître en question dont Payet est le relais est Gozo Shioda (1915-1994). Un mot sur ce dernier. Il va vivre en résidence durant huit ans chez le fondateur de l’aïkido, Morihei Ueshiba. Shioda enseignera par la suite dans un vieux dojo. Payet qui a appris son existence dans un documentaire, ira à sa rencontre et se fera élève durant cinq ans là-bas.  Ce qui rend cette lecture passionnante, même pour quelqu’un qui n’a pas d’intérêt particulier pour l’art martial, c’est la description, le récit de son contact avec un pan de la culture japonaise. Qu’est-ce qu’un maître, comment on le devient soi-même, les rites initiatiques. C’est véritablement captivant.

L’autre ouvrage Aïkido l’autre chemin de Thierry Pardo serait en quelque sorte le complément du précédent car il nous donne un bref historique de cet art martial et aussi de ses composantes. Son auteur, un maître, à son propre dojo à Montréal. Il y a créé son école, Ko Michi. En résumé, la personne qui veut s’initier à l’aïkido trouvera dans ces pages des notions toutes simples à comprendre. Car on comprendra qu’il y a aussi des degrés qui peut atteindre des degrés vertigineux d’apprentissage. Même, et on l’apprend à la lecture, il a été demandé aux théoriciens de rendre l’aïkido plus accessible au commun.

 

 

 


La grande leçon de résilience d’un rescapé de la Shoah

L’homme que vous voyez sur la couverture de L’homme le plus heureux du monde affiche un beau sourire. Il se nomme Eddie Jaku et a 101 ans! Et pourtant il n’aurait pas de raison d’afficher une telle posture, car lui il a connu l’enfer sur terre qui a pour nom Auschwitz. Sur cette même couverture, il montre son numéro d’immatriculation gravé sur son bras. Il répond à la question que souvent on se pose, comment parvenir à vivre après avoir été confronté à de telles horreurs ? En somme vous avez le choix de dépérir psychologiquement et ne plus croire en la race humaine, ou de ne pas traîner ce boulet de vie et hypothéquer son futur. L’auteur nous fait vivre cette évolution mais d’abord ce qu’il a vu et enduré dans deux de ces camps de la mort, Buchenwald et Auschwitz où en tant que juif, il ne pouvait sortir que par la cheminée. Il dit lui-même ne pas être revenu de la capacité d’un humain de pouvoir survivre dans ces conditions extrêmes.  C’est un beau devoir de mémoire en même temps qu’une sacrée leçon de vie.

L’homme le plus heureux du monde Eddie Jaku. Michel Lafon 221p.    www.michel-lafon.com

 

 

 


Le goût érotique de l’ébène

Pour son troisième roman, le lillois Hugo Drillski a imaginé les tribulations d’une femme qu’on dirait en apparence bien mariée, mais qui s’ennuie à mourrir. D’autant que côté libido avec le mari, c’en est fini depuis bien longtemps, monsieur ayant succombé à une addiction bien de son époque, les jeux vidéos. C’est un ami gay qui va l’amener à voir ailleurs et cet ailleurs érotique et sensuel s’incarnera à travers les bras et le membre puissant d’un homme noir. C’est un style pas vraiment hardore, mais plutôt du genre romance érotomane. D’ailleurs ce titre chez Tabou entre dans la collection justement nommée ,“Vertiges tendance rose”  De quoi donner des idées à beaucoup de femmes.

Noir, c’est noir Hugo Drillski. coll. Vertiges éditions Tabou 256p.    www.tabou-editions.com

 

 

 


Sur les gens libres et la traite des fourrures

Qu’on les appellent freeman ou gens libres, ont fait référence à ces trappeurs qui, au contraire de ceux qui bossaient selon des pratiques encadrés par des compagnies comme la Baie d’Hudson, étaient en sorte des agents libres. L’historien Guillaume Marcotte est un expert du commerce en Nouvelle-France et particulièrement de la traite des fourrures. Avec De freeman à Métis il comble un fossé dans la connaissance d’un aspect de leur travail, c’est celui qui se déroulait entre la Baie James et Montréal, car on en savait davantage pour ce qui concerne l’Ouest canadien. On apprend que les compagnies de traite allouaient des avances, du crédit en somme, qui pouvaient amener les gens libres à s’endetter.  D’où des arrangements pour rembourser son dû. C’est toute  une épopée qui se déploie sous nos yeux. Sans compter les conditions dans lesquelles ces coureurs des bois exerçaient leur métier. Il est question fatalement des liens avec les communautés autochtones et les relations intimes avec les femmes issues de ces tribus.

De freemen à Métis l’histoire retrouvée des gens libres entre la Baie-James et Montréal. Guillaume Marcotte. Presses de l’Université Laval 342p.     www.pulaval.com

 

 

 


Monique Michaud princesse du happy end

Nous aurions pu écrire que Monique Michaud est la reine du happy end, mais cela suppose une notoriété un peu plus grande dans le monde des lettres d’une part et que cela aurait pu heurter sa modestie d’autre part. Alors attribuons-lui le titre de princesse. C’est déjà un début. Car elle accomplit en ce moment sa plus grande gratification en littérature avec cette trilogie dont deux tomes sont sortis, baptisée Joie de vivre aux éditions Goélette. Chaque tome est une histoire indépendante, de sorte que si vous avez raté le premier, vous pouvez passer au second et vous retrouver avec une histoire différente et complète. Les deux bouquins ont en commun de raconter des destins qui auraient pu être marqués de façon indélébile au fer rouge, mais qui, de par la volonté des protagonistes, feront en sorte de se conclure de la plus agréable des façons. Ainsi dans le premier tome “Vickie et le Dépanneur Jolicoeur” nous voyons vivre une veuve qui gère seule un dépanneur à Joliette. Elle a beaucoup de responsabilités sur ses frêles épaules. C’est la rencontre avec une âme esseulée comme elle, Vincent, qui va changer la donne.

Le tome 2 “Deux voisines de coeur” nous transporte à Lavaltrie. Car il faut vous dire que la romancière est tombée raide dingue de la région de Lanaudière et veut la célébrer de la sorte en campant ses histoires dans des décors du coin. Là nous avons deux voisines dans la trentaine, Marjo qui cherche un homme pour la révéler à sa féminité. Tandis que sa voisine, Léonie est assez languissante, voulant elle aussi un mec dans sa vie. Elles feront connaissance et deviendront inséparables. La Boétie qui jadis évoquait sa belle relation avec Montaigne par sa déclaration célèbre “Parce que c’était lui, parce que c’était moi” n’en aurait pas dit autrement sur ces deux femmes, qui opposent un sérieux démenti à savoir que l’amitié entre deux femmes est du domaine de la fiction. Ceux et celles qui cherchent ces petits livres qui font du bien sont à bonne enseigne.

 

 


Un avis de grand intérêt sur la crise sanitaire

La littérature s’est emparée du sujet de la pandémie du Covid-19 avec un flot de titres. L’un de ceux-là vaut le détour. C’est Une démocratie confinée signé Emmanuel Hirsch professeur entre autres d’éthique médicale et président du Conseil pour l’éthique de la recherche et l’intégrité scientifique à l’Université Paris-Sarclay et membre du Conseil stratégique Covid-19 de la région Île-de-France.  Dans cette dernière fonction, lui qui a l’esprit critique, doit être parfois en butte avec ses collègues qui n’ont que la dictature sanitaire à l’esprit alors qu’il écrit ceci citant le philosophe Claude Bruaire “ou la moral est affaire de liberté ou elle est assimilée à un ensemble de contraintes contre lesquelles la liberté doit se dresser” et plus loin c’est lui qui parle “refuser le port du masque dans l’espace public doit être compris comme un acte politique. Rien à voir avec la négligence ou l’insouciance”. A ces seules citations vous comprendrez du grand intérêt à parcourir ces pages très critiques aussi sur la manière dont le gouvernement français a anticipé le problème. Une incurie sans nom.

Une démocratie confinée L’éthique quoi qu’il en coûte. Emmanuel Hirsch. Érès 336p.   www.editions-eres.com

 

 

 


Le poète Marc André Brouillette persiste et signe

Le communiqué de presse annonçant la sortie du dernier recueil de poésie de Marc André Brouillette La langue de ta langue” s’inscrit dans la continuité de son texte de 2015 “Ta voix là” inspiré par la démarche de l’écrivain Mario Luizi.  Cette fois c’est l’Argentine qui est la source d’attraction. Mais encore là, c’est une transposition à la manière de. Celui qui est professeur au Département d’études littéraires de l’UQAM a de belles fulgurances. Extrait “la main trace des lignes des départs des lettres pleines de nuit que le temps dérobe entre le battement des paupières du coeur.” Notons que l’homme de lettres s’interroge constamment sur les mouvements du corps et de la langue.

La langue de ta langue Marc André Brouillette. Noroît 94p.    www.lenoroit.com

 

 

 


Une maison inspirante

Qui a dit un jour cette sentence “objets inanimés avez vous une âme”. Eh bien la réponse se trouve dans ce très beau roman Semi-détachées de Marie-Ève Fortin-Laferrière. L’histoire de deux soeurs Dominique et Éléonore qui dans le quotidien s’interpellent par les diminutifs Dom et Éléo. Cette dernière vit à Paris. Des années plus tard, elles seront les légataires de la maison familiale. L’occasion de se retrouver. Et c’est cette maison qui sera véritablement le centre d’attraction. Tous ces souvenirs qui vont remonter à la surface. Les deux femmes ont des compagnons mais ce n’est pas la panacée avec ce que ça suppose de faire cohabiter deux êtres dans le même périmètre. Si pour vous l’habitat revêt une importance capitale, alors vous allez être conquis par cette lecture qui dit à peu près tout ou presque de ce qu’une maison peut suggérer d’états d’âme.  Et aussi, évidemment de beaux passages sur le lien filial.

Semi-détachées Marie-Ève Fortin-Laferrière. Leméac 204p.   

 

 

 


Noirceur et illumination

Si vous voyez une photo de l’écrivain Roy Braverman qui pose devant un verre d’alcool, il vous viendra des ressemblances avec Charles Bukowski. En tout cas, s’il y a une parenté avec ce dernier, c’est qu’il n’a pas peur de dire les choses crûment, ou quand ce n’est pas lui, ce sont ces “héros” comme l’inspecteur Donnelli au centre de sa dernière ponte Manhattan sunset. Un flic new yorkais donc, qui a eu la douleur de voir un de ses collègues assassiné, l’agent Pfiffelman. Qui tout au long de ce polar très noir, va intervenir dans sa conscience comme un fantôme. Et Donnelli d’entreprendre de longs soliloques avec lui. Il aura le devoir de le venger. Ensuite il a une collègue Mankato qui ne manquera pas de souligner son côté phallocrate et vieux macho. Mais malgré cet esprit bien trempé, il a du coeur au ventre. Ici on dans un contexte de grande violence, et vous ferez connaissance avec la mafia lituanienne qui ne fait pas dans la dentelle. A travers ce monde des ténèbres il y a ce passage qui célèbre le passage du soleil dans le 42ème qui donne son nom au titre. Une rare clarté. Et puis vous savourerez les dialogues à la dure qui donnent le ton.

Manhattan sunset Roy Braverman. Hugo thriller 364p.    www.hugothriller.com

 

 

 


Comment dire non au soft totalitarisme

Journaliste au magazine The American Conservative Rob Dreher s’est fait connaître avec un titre au palmarès “Le pari bénédictin”. Côté spiritualité, il a été élevé dans une famille méthodiste pour passer ensuite catholique. Maintenant il a épousé cette fois le credo orthodoxe. Il publie Résister au mensonge avec pour sous-titre “vivre en chrétiens dissidents”. Il ajoute, comment être chrétien dans un monde qui ne l’est plus. Avec la montée des populismes, il voit la démocratie de plus en plus en péril. Il a même une expression, à savoir que nous baignons maintenant dans une sorte de soft totalitarisme qui n’ose dire son nom. Et pourtant il ne fait aucunement référence dans ces pages à l’actuel diktat sanitaire. C’est surtout au modèle communisme qu’il s’en prend, revenant sur des pages de l’histoire du passé. Il se veut le chantre de la liberté de parole. Alors si vous trouvez que nos gouvernements mondiaux profitent de la crise sanitaire pour enfoncer le bouchon liberticide, alors vous avez une occasion de trouver des ressources spirituelles pour résister.

Résister au mensonge Rob Dreher. Artège 226p.    www.editionsartege.fr

 

 

 


Un duo d’enquêteuses irrésistibles

Dans le genre polar, il y a cette catégorie très chic où l’humour est au rendez-vous, souvent à la sauce british. Mais les américains, quand ils s’y mettent, ne sont pas en reste. Voici Stephen Spotswood digne émule d’Agatha Christie qui arrive avec un premier roman dont il imagine une série avec une enquêteuse fétichiste, voire même deux. En effet, pour son entrée en littérature policière, il a créé le personnage d’une détective d’un âge certain, Lilian Pentecost. Nous sommes dans la métropole américaine en pleine seconde guerre mondiale. Elle doit élucider le meurtre d’une jeune veuve issue de la classe sociale supérieure. L’arme du crime, tenez-vous bien, est la boule de cristal d’une voyante. Mais comme elle se sent en fin de carrière, elle va se choisir une coéquipière qu’elle va dénicher dans un cirque, experte...en lancer du couteau répondant au nom de Willowjean Parker. Sans doute un prérequis pour mener des enquêtes du genre! On s’amuse beaucoup à la lecture de La fortune sourit aux disparus. Ce Spotswood est à suivre, car il maîtrise très bien les ficelles de ce type de littérature où on est toujours surpris de la conclusion.

La fortune sourit aux disparus Stephen Spotswood. Calmann-Levy 365p.   www.calmann-levy.noir.fr

 

 

 


Sur un des faits divers les plus marquants au Québec

Éric Veillette est un merveilleux historiographe de la chose judiciaire dans la Belle Province. On lui doit des ouvrages sur le procès d’Aurore l’enfant martyre et la récapitulation des condamnés à mort. Cette fois il nous annonce deux tomes concernant un des grands faits divers de chez nous, l’explosion de l’avion au Sault-au-cochon dans s’empara le septième art. (Le crime d’Ovide Plouffe) En effet, le 9 septembre 1949 un DC-3 explosa en plein vol au-dessus de Sault-au-Cochon à l’Est de Québec. Ce drame causa la perte de 23 personnes à son bord. Dans les annales, ce fut le premier attentat aérien à ce jour sur le continent nord-américain. Veillette revient pas à pas sur cette affaire, posant même la question d’une possible erreur judiciaire. Vous verrez pourquoi. On apprécie le travail de ce limier du journalisme, un peu moins de l’éditeur qui utilise une typographie pâlotte qui force la vue. Seul bémol à ce livre qui pour le reste est captivant au possible. Et pour le tome 2, que l’éditeur fasse plaisir aux yeux des lecteurs.

Sault-au-cochon Tome 1 le crime du siècle. Éric Veillette. Les éditions de L’Apothéose 422p.     www.leseditionsdelapotheose.com

 

 

 


La perpétuation de la chasse aux sorcières

Si vous croyez que la chasse aux sorcières est de l’histoire ancienne, détrompez-vous. Ça continue de plus belle, des milliers de femmes chaque année, notamment sur le continent africain où c’est la manière de déposséder les femmes de leur biens ou de leur pouvoir. On se souviendra qu’aux époques antérieures on brûlait des femmes en place publique, c’était pour se débarrasser des femmes trop intelligentes et revendicatrices pour les pouvoirs en place. Bref, la militante féministe italienne Silvia Federici nous fait part que ces sinitres pratiques se perpétuent. Tout un réquisitoire qui ne provient pas d’une féministe radicale et partiale. Au contraire, nous sommes dans l’ordre du documentaire, avec des statistiques accablantes. Une guerre mondiale contre les femmes est une charge contre des meurtres gratuits légitimités par des cultures qui font honte à la dignité humaine.

Une guerre mondiale contre les femmes  Silvia Federici. Les éditions du remue-ménage 138p.     www.editions-rm.ca

 

 

 


Quand un malheur ne vient jamais seul

La Sauvagine de Sophie Brocas est un roman certes mais qui fait croiser différentes histoires, une usine qui maintenant fermée, a eu le temps de contaminer passablement et de ruiner des santés. Un bled qui est dans la mire des bobos qui en défigure le paysage. Une femme, Mado, qui est atteinte de la leucémie et que seul son frère Léon peut sauver. Ailleurs une paternité qui a été faussée et reléguée aux squelettes dans le placard familial.  Cet ouvrage illustre bien l’adage qui veut qu’un malheur ne vient jamais seul. Que fera Léon face à sa soeur, lui finalement pétri de remords et qui songe à mettre fin à ses jours ? On ne vous en dévoilera pas l’issue pour ne pas bouder votre plaisir. Mais sachez que c’est un texte fort qui illustre bien ce que disait Malraux, à savoir que l’homme est un tas de petits secrets. Des choses enfouies oui, et qui causent tant de dégâts. A mettre au-dessus de la pile de votre prochain achat de livres.

La Sauvagine Sophie Brocas. Éditions Mallet Barrault 185p.   

 

 

 


C’était un garçon, elle aurait voulue une fille

L’autre jour sur le plateau de “On est en direct” de Laurent Ruquier, le philosophe et essayiste Michel Onfray s’en prenait à cette tendance d’appuyer des enfants qui soudainement ne se sentiraient pas bien dans la peau de leur sexe présent et qui aspire à passer vers l’autre sexe. Avec la conclusion qu’il ne fallait pas tomber dans le pathos et voir les choses froidement, c’est-à-dire laisser les enfants tranquilles et ne pas se substituer à eux en leur appliquant ses propres fantasmes genrés.  C’est à cela que l’on pensait à la lecture de L’enfant travesti de Jean-Luc Seigle alors qu’une femme qui revient de son travail au bout de chaque semaine, profite du weeek-end poutr travestir son fiston Jean en fille et le traiter en tant que tel. Le romancier indique qu’il s’inspire d’un fait de son existence. Au passage il est décédé en mars de l’an dernier. Il nous laisse en héritage un texte qui remet en question nos a priori sur la question du genre, sujet tendance s’il en est.

L’enfant travesti Jean-Luc Seigle. Flammarion 409p. 

 

 

 


Les tribulations d’un québécois en France qui veut en finir avec l’alcool

Alain Turgeon, d’origine québécoise, notre compatriote, vit à Lyon depuis trois décennies. Il écrit, mais sait se faire attendre.  Mais l’attente en valait l’attente puisque la gestation a pris une décennie. Il n’avait pas d’autre choix que d’être bon. Mieux encore c’est génial. Voyez vous-même. Il décrit dans En monde faible intérieur l’histoire d’un québécois qui est en France, son pays d’adoption. Il a un talon d’Achille, la dive bouteille, une bouteille de vodka...par jour. Avec les conséquences que l’on peut imaginer. Conscient de sa dérive, il ira suivre un traitement de choc. A la base c’est une trame assez simple. Des livres sur des mecs qui boivent trop, il en pleut. Mais lui, il possède un esprit caustique. Il est très lucide, voit tout autour de lui et ne se ménage pas. On l’accompagne dans sa quête d’une vie plus saine. N’hésitez pas à le lire, c’est du pur divertissement. En ces temps de morosité sociale, c’est tonifiant.

En mon faible intérieur Alain Turgeon. La fosse aux ours 221p.  

 

 

 


Tout ce qu’il faut savoir sur le plaisir coupable gustatif au Québec

Même de fines fourchettes reconnaissent du bout des lèvres qu’il leur arrive, c’est leur plaisir coupable, d’enfourner une poutine. Pour d’autres c’est le “comfort food” par excellence avec 1400 calories dans le corps et du bonheur jusqu’au bout des oreilles. Ce “noble” met se devait d’avoir un livre pour honorer sa présence. C’est chose faite avec Sylvain Charlebois, professeur en agro-alimentaire. Il nous dit tout ce qu’il faut savoir sur ce fast-food chéri non seulement des québécois, mais de partout sur la planète. Poutine nation fait voir le rayonnement mondial de ce produit aux trois composantes de base: frites molles, fromage en grains et sauce brune. Il a tenté en vain de trouver à qui on est redevable de la paternité de ce produit à nul autre pareil. Il émet toutes les hypothèses connues. Et on apprend que des canadiens envieux s’en attribuent la découverte!” Distrayant au possible. Et qui nous donne le goût immédiat de s’en farcir une.

Poutine nation Sylvain Charlebois. Éditions Fides 218p.     www.groupefides.com

 

 

 


Historique des traités avec le peuple de la grande rivière

il faut être un véritable familier de la vie autochtone au Québec pour savoir de quoi il est question lorsque l’on parle de la Première Nation Wolastoqiyik Wahsipekuk. En fait c’est la Première Nation Malécite de Viger qui en 2019 s’esr réapproprié un nom qui est en lien avec sa langue et qui signifie peuple de la grande rivière. Une communauté située géographiquement dans le sud-est du Québec et frontalière. Un ouvrage de grande érudition historique voit le jour Alliances et traités avec les peuples autochtones du Québec centré spécifiquement sur la communauté autochtone précitée. Un travail en duo de messieurs Camil Girard et Carl Brisson les deux issus de l’Université du Québec à Chicoutimi. Même s’il s’agit d’un thème pointu, c’est fascinant de voir ce qu’a été l’évolution des Malécites, parmi les premiers signataires de traités avec Champlain. Nous sommes donc au tout début de la colonisation en Nouvelle-France. Et comment eux, comme les autres nations autochtones ont connu le génocide culturel aux mains du gouvernement fédéral. Toute une épopée qui défile sous nos yeux et les compromis faits dans chaque camp pour préserver la paix.

Alliances et traités avec les peuples autochtones du Québec Camil Girard et Carl Brisson.  Presses de l’Université Laval 344p.    www.pulaval.com

 

 

 


La Covid-19 inspire un roman

Cette pandémie Covid-19 dont on découvrira fatalement un jour ou l’autre à qui elle aura réellement profité, suscite son lot d’ouvrages, pour l’essentiel des essais. Mais aussi de rares romans. En voici un Covid-19 La conspiration de Guy F. Blouin un enseignant du niveau secondaire qui n’anticipe rien de très réjouissant concernant le futur de l’humanité. Il n’a pas eu le drame de la page blanche pour s’inspirer de ce dont on sait à ce jour, de l’origine du fameux virus. Ici il a imaginé un médecin légiste membre du FBI qui en compagnie d’une journaliste vont être mis au courant d’un sombre dessein visant à réduire le nombre des vivants de la planète. Ça donne froid dans le dos. Et en lisant ces lignes qui n’ont plus grand chose avec de l’anticipation, on a comme un goût amer que l’on est entrain de nous en faire passer une belle. Le roman est court mais c’est du direct.

Covid-19 la conspiration Guy F. Blouin. Éditions La Plume d’Or  111p.   www.editionslpd.com

 

 

 


Seule en scène avec sa grande fragilité humaine et sa transparence

 Rébecca Déraspe est actuellement en résidence au théâtre de La Licorne comme écrivaine. C’est en 2010 qu’elle terminait son programme d’écriture dramatique à l’École nationale de théâtre. Elle a beaucoup écrit depuis. Mais il arrivera un petit défi dans sa vie d’auteure, un fameux 30 janvier 2020 sur la scène de La Licorne où elle présente un concept que l’on pourrait résumer simplement en parlant de “one woman show” ayant pour titre Combattre le why-why. Comme tout un chacun vous allez vous demander ce que ce why-why signifie. Appelons cela un sentiment de spleen, de vide etc. Pour le contenu, on trouve mille et une réflexions dont certaines sont prémonitoires. Notez qu’à la date de la première représentation on sera en mars suivant en début de pandémie. Et que dit Rébecca “Faut que ça arrête les libertés restreintes l’asservissement du nombre On s’enferme entre nous tout s’absente même le désir”. Comme si elle avait vu le futur dans une boule de cristal. Vous voyez l’intérêt de se pencher sur le texte dont nous disposons maintenant et qui nous permet d’apprécier cette artiste lucide comme dix.

 Combattre le why-why Rébecca Déraspe. Les éditions de ta mère 116p.    www.tamere.org

 

 

 


Un roman inspiré par l’effondrement du pont de Gênes

L’actualité nous a montré les effets désastreux de l’effondrement du pont de Gênes en 2018. Cela a inspiré Julien Sandrel qui accouche de Vers le soleil. Qui raconnte cette femme, Tess qui fait route vers la Toscane, prévoyant une halte à Gênes, question de rencontrer une amie. Le pont s’effondre à ce moment et elle sera portée disparue. Allant vers la Toscane c’était également pour retrouver sa fille Sienna, âgée de neuf ans qui se trouve rituellement avec son oncle quelques jours par année. Dont on apprendra ensuite qu’il n’est pas véritablement son parent. Mais là, on anticipe. Qu’est-ce qui arrivera si jamais Tess est trouvée morte ? Entre en jeu la responsabilité de cette fillette qui n’a aucune filiation légale. Voudra-t-il s’enfuir avec elle. Dans l’immédiat, il se veut rassurant à l’endroit de l’enfant. Nous sommes en face d’une autre narration forgée sur les secrets familiaux. Qui semble être un terreau inépuisable. Mais ici, c’est du costaud. Ce pourrait faire un très bon film en passant. Avis à ceux qui croient que tout a été dit et fait au septième art. En attendant vous pourrez vous-même créer vos images. Quand à Tess on vous laisse le soin de savoir si elle est disparue pour toujours ou qu’elle ressurgira des décombres.

Vers le soleil Julien Sandrel. Calmann-Lévy 268p.     www.calmann-levy.fr

 

 

 


En réponse à une femme

Il y a toujours quelque chose d’émouvant de découvrir un nouveau noviciat des lettres comme Alesis Weinberg qui débarque avec Le détour. Un homme dans une chambre quelconque répond à une lettre reçue de sa dulcinée, une relation qui au passage vacille. On le sait, coucher ses sentiments sur papier libère. Et justement, que va t’il libérer notre homme ? Lui dire que tout est fini ? Il y aura toutes sortes de circonvolutions dans sa réponse, avec des allers-retours dans sa vie, comme pour que sa correspondante le voit tel qu’il est réellement. Comme entrée dans le monde de la littérature c’est plutôt réussi. Avis à ceux qui décernent des titres pour souligner un premier roman, car il le vaut bien.

Le détour Alexis Weinberg. Gallimard 152p.   

 

 

 


A Montréal au XIXème siècle au temps des belles de nuit

C’était au départ une thèse de doctorat mais Mary Anne Pontanen avait sans doute la prescience que son sujet serait susceptible de rejoindre un vaste auditoire. En effet, elle a centré sur sa recherche sur le vécu au quotidien des prostitué(e)s dans le Montréal du XIXème siècle. A l’ombre des homélies ultramontaines de Mgr. Bourget, le plus vieux métier du monde s’exerçait. On ne peut pas compléter en affirmant que c’était à coeur joie. Car le portrait qu’elle donne de ces pauvres malheureuses relève plus du Londres de Dickens. L’essayiste nous montre un vaste panorama, abordant le contexte qui a mené ces femmes à livrer leur corps en échange d’argent. Souvent le bordel en question c’était à la maison. Ensuite la morale ambiante et surtout l’évolution de la justice face à outrages aux bonnes moeurs. En prison par exemple, on nourrissait les prisonnières, que de pain et d’eau. Et il faut voir les prisons. Les cellules ayant plus l’allure de cachots. La nourriture plus consistante étant amenée par les proches des détenues. Chaque page est une véritable mine d’information.

Une histoire sociale de la prostitution Mary Anne Pontanen. Les éditions du remue-ménage  488p.   www.editions-rm.ca

 

 

 


Il n’y a pas qu’un seul journalisme

Si en cette période de Covid-19 vous avez l’impression que tous les médias, avec de très rares exceptions, chantent à l’unisson les vertus des politiques sanitaires gouvernementales, vous n’avez pas faux. Vous vous trouvez en face de ce qu’on nomme le journalisme de solution. Une des nombreuses facettes du journalisme. Ce dernier exemple montre que dans des circonstances particulières, pour veiller au bien commun, les médias mettent un instant de côté leur rivalité pour offrir des messages d’alertes à la population. Et il y en a d’autres formes. C’est ce que reprend Marc-François Bernier dans Les journalismes en collaboration avec Thierry Watine. Le premier professeur titulaire au Département de communication de l’Université d’Ottawa passe en revue l’éventail d’informations qui se présente à nous. Et comment la profession s’est mis diapason de nouveaux besoins, déboulonnant au passage certains mythes qui perdurent.

Les journalismes Jean-François Bernier. En collaboration avec Thierry Watine. Les Presses de l’Université Laval 136p.      www.pulaval.com

 

 

 


Prospective chrétienne

D’aucun, pandémie ou pas, sont d’avis que nous assistons à la fin d’un monde et le début d’un autre. Du côté du christianisme qu’en est-il ? Est-ce que les religions chrétiennes Fortes de deux mille ans d’histoire vont être en mesure de passer au travers ? Surtout à l’heure de la montée grandissante de la laïcisation et des populismes sur fond d’athéisme. Un magnifique essai, s’il n’agit pas comme une boule de cristal, propose par contre des pistes intéressantes. Le XXIème siècle du christianisme sous la direction de Dominique Reynié explore toutes les perspectives qui se présentent pour les religions monothéistes. Un travail rigoureux. Est-ce que cet héritage chrétien est gage d’avenir ?  Monsieur Reynié est directeur de la Fondation pour l’Innovation Politique (Fondapol) qui est un carrefour d’échanges pour le renouvellement du débat public.

Le XXIème siècle du christianisme Collectif sous la direction de Dominique Reynié. Les éditions du Cerf 376p.    www.editionsducerf.fr

 

 

 


Un preux chevalier ramené d’entre les morts

Si vous avez aimé la série télévisée culte “Les rois maudits” adaptée du livre de feu Maurice Druon, vous allez être agréablement en terrain de connaissance avec la sage Damné de Hervé Gagnon. Il a bien des pouvoirs ce romancier, capable de faire mourir un chevalier et le faire renaître d’entre les morts. C’est ce qui va arriver avec le jeune fils de seigneur Gondemal de Rossal. Qui sera élevé à la dure, car on le sait, quiconque veut bien être meneur doit d’abord apprendre à servir. Mais justement, il n’aura pas le temps de faire un long apprentissage le jeunot car il sera trucidé. Il ressuscitera pour prendre la place qui lui était dévolue. Vous voulez de l’action ? En voici à la pelle. Sa mission terrestre sera de protéger la Vérité. Il y là comme une quête du Graal.

Damné Hervé Gagnon. Hugo poche 600p.   www.hugoetcie.fr

 

 

 


Une digne émule d’Orwell

Le 21ème siècle consacre à la fois l’omni puissance des réseaux sociaux et le déploiement de l’intelligence artificielle. Il y a de quoi pour un écrivain, de se projeter dans le futur. C’est ce que fait allègrement Samanta Scweblin dans Kentukis qui donne son titre aux petits robots de l’histoire, qui s’invitent partout sur la planète. Ils sont mignons, mais oh combien intrusifs. Qui finissent par tout savoir de vous même dans l’inavouable. L’écrivaine est dans les pas de George Orwell. C’est dans la collection “Du monde entier” de Gallimard que nous chérissons bien. Pour l’instant ça demeure de la fiction, mais imaginez une sorte de Hélix à la Vidéotron qui vous suivrait à la trace, rapportant une mine d’information à un commanditaire anonyme. Cela glace le sang rien qu’à savoir son intimité ainsi violée.

Kentukis Samanta Schweeblin. Gallimard 265p.

 

 

 


Boucar Diouf complète sa trilogie sur fond d’écologie

A croire que ce cher Boucar Diouf est béni des dieux. Tout ce qu’il touche du côté de la littérature remporte un vif succès. Et quelle curiosité! Qui peut passer ainsi allègrement d’un traité sur les excréments à un conte comme enfant! Il faut une sacrée polyvalence. Et il a trouvé le moyen de compléter sa trilogie “Boucar raconte” qui a pour titre Jonathan Tenderbear et la sagesse du corbeau. Cet ours a un coeur d’or. Altruiste comme cinq, il va aider un phoque en détresse à retrouver sa niche, alors que lui-même est en quête de retrouver son frère disparu. Et que dire des illustrations de François Thisdale qui fait dans quasi l’hyper réalisme. On ne se lasse pas de voir à quelle enseigne il a été inspiré par l’écrivain humoriste.Un beau récit d’aventure dont petits et grands raffoleront.

Jonathan Tenderbear et la sagesse du corbeau  Jonathan Tenderbear et la sagesse du corbeau. Les éditions La Presse 269p.    www.editionslapresse.ca

 

 

 


L’histoire du bande de filles magnétiques

Comme Mathilde Carton aime les sujets qui croisent culture et politique, elle est servie avec les Riot grrrls qui de l’émergence punk ont pavé la voie à de multiples chanteuses. Elle leur consacre une “biographie” artistique. Racontant la trajectoire de cette formation singulière qui n’a cessé de revendiquer que les femmes ont aussi un pouvoir. Un courant qui considère que plus les femmes créent et plus les inégalités s’estompent. C’est vrai que lorsqu’une femme fait un doigt d’honneur, ça marque les esprits et on ne voit alors guère en elle une maman. Une des protagonistes du livre va même bosser chez McDo pour...payer son avortement. Plus trash que ça tu meurs. A lire sans hésitation, car au-delà de la musique comme telle, c’est tout un monde de vie qui se déploie et qui montre que l’éducation non formatée d’une jeune fille peut être une promesse d’avenir.

Riot grrrls Mathilde Carton. Le mot et le reste 236p.   

 

 

 


Au contact d’une icône féminine de la révolution soudanaise

Peut-être que le nom de Alaa Salah ne vous dit rien. Soyez excusez, on ne peut pas tout savoir. Mais on ne peut demeurer plus longtemps dans l’ignorance de l’existence de cette militante soudanaise qui a contribué à faire la révolution dans son pays et à chasser Omar El-Béchir le potentat en place. Elle se raconte dans Le chant de la révolte qui reprend toute l’histoire de son combat pour le rétablissement de la liberté. Sa démarche s’inscrit dans le mouvement Girifna qui signifie là bas qu’on en a assez. Née d’un père ingénieur en bâtiment et se destinant à l’architecture, rien n’aurait pu laisser présager le destin qui allait être le sien et devenir une sorte de Nelson Mandela dans son pays. Il faut dire que le sang révolutionnaire de sa mère et de sa soeur coule dans ses veines, elles-mêmes d’actives militantes.   Entre autres leçons du paternel qu’il ne fallait aucunement tenter de plaire à la société mais seulement à Dieu. Elle et les femmes soudanaises ne l’ont pas eu facile avec les mesures répressives du gouvernement qui visaient à remettre les femmes à leur place. C’était sans compter la détermination de cette leader. Une beau portrait de femme à découvrir et inspirante.

Le chant de la révolte Alaa Salah. Favre 146p.    www.editionsfavre.com

 

 

 


Enfin une biographie de référence sur Ella Fitzgerald

La reine du scat qui avait hérité aussi du surnom de “The First lady of swing” a enfin droit à une biographie de référence réalisée par Steven Jezo-Vannier. Un ouvrage qui vient enrichir la remarquable collection de titres sur la musique aux éditions Le mot et le reste. Chanteuse dotée de trois octaves dont elle se sert à merveille, elle va scatter en respectant toujours la partition. Elle qui a débuté à seize ans au célèbre cabaret Apollo dans Harlem cumulera 60 années de carrière. Comme toute afro-américaine, elle devra composer avec le racisme qui est une composante de l’ADN de la culture chez nos voisins au sud de la frontière. Orpheline, elle débute en remportant des concours d’amateurs. Elle sera vite repérée et encouragée. On se souvient moins qu’elle a été actrice au grand écran. Et à ce chapitre c’est une Marilyn Monroe admiratrice achevée de la chanteuse qui viendra lui donner un sacré coup de pouce. Et malgré la renommée qui est la sienne, elle sera sous-payée comme ce fut le cas pour tous les artistes black mais en plus elle avait un manque de confiance abyssal. Elle a eu une fin de vie attristante causée par un diabète fulgurant qui la rendit aveugle mais aussi qui l’obligea à l’amputation de ses deux jambes. C’est une biographie qui regorge de mille anecdotes et qui donne le goût de se précipiter sur You tube pour aller l’entendre.

Ella Fitzgerald Il était une fois l’Amérique. Steven Jezo-Vannier. Le mot et le reste 367p. 

 

 

 


Bricoler pour la nature

Avec le beau temps à nos portes, plusieurs voudront aménager des habitats pour les différentes pousses du jardin, petits et grands. Un guide paraît, qui est une merveille qui regorge de petits tuyaux pratiques pour bâtir des structures de toutes les formes  Nous devons Agir pour la nature au jardin à David Melbeck sur des illustrations de Sylvain Leparoux ce dernier ayant travaillé très fort afin que ces dessins permettent de mieux comprendre les principes de construction. L’éditeur a mis un soin jaloux du côté de la présentation graphique, offrant ainsi un bel écrin à la hauteur de la qualité de travail. On a vraiment pensé à tout dans ces chapitres, même un refuge hivernal pour coccinelles.

Agir pour la nature au jardin David Melbeck, illustrations de Sylvain Leparoux. Éditions Salamandre 203p.      www.salamandre.org

 

 

 


Un album émouvant sur nos rivières

Quand s’annonce la venue d’un nouvel ouvrage portant la signature de Normand Cazelais vous pouvez être certain que l’on aura affaire à une réalisation soignée. Et là il le démontre encore une fois magistralement, au zénith de son talent avec son album  Un pays de rivières qui est une “biographie” de nos rivières. Au même titre que des individus ont des histoires, nos rivières en possèdent également et comment donc.  La démarche est intéressante car à la fois nous sommes en face d’un travail d’érudition mais conçu pour être accessible au plus grand nombre avec des historiettes savoureuses à chaque page. Le communiqué de presse accompagnant sa sortie nous informe que l’on répertorie dans la Belle Province 4500 cours d’eau dont 300 n’ont pas encore de noms. Vous avez des photos et illustrations qui nous rappellent à quel point le Québec est riche au plan hydrographique. L’auteur qui est géographe de formation avec une feuille de route en éducation et information longue comme ça, fait intervenir différentes disciplines pour appuyer son propos, comme la peinture avec Suzor-Côté, l’ethnographie pour raconter une belle histoire d’amour entre des descendants d’amérindiens. Du bonheur!

Un pays de rivières Normand Cazelais. Les éditions La Presse 326p.    www.editionslapresse.ca

 

 

 


Johnny par sa garde rapprochée

Il s’en est écrit des trucs sur le Taulier depuis sa mort. Mais l’album merveilleux qui sort Johnny Hallyday et ses anges gardiens sort de l’ordinaire. Pourquoi ? Parce que deux de ses auteurs ont fait partie de la garde rapprochée de l’interprète d’Allumer le feu. D’abord Sacha Rhoul qui a été son secrétaire particulier de 1966 à 1983 et qui a couvert son patron dans toutes les situations inimaginables, puis Jean Basselin qui durant dix ans, a été l’intendant du rocker. S’ajoute le journaliste Laurent Lavige, spécialiste de la chanson française. Ils nous offrent tout un cadeau, des documents et des anecdotes inédites sur Johnny. Et ce n’est pas une hagiographie loin de là. Même quand l’artiste allait dans l’excès, on le raconte. C’est un des plus beaux témoignages paru à ce jour. S’il fallait choisir un  ouvrage à travers tout ce qui s’écrit sur lui, eh bien avec celui-là vous savez tout ou presque. Et l’éditeur a mis un soin jaloux à la présentation graphique pour offrir un bel écrin à ce travail et son sujet.

Johnny et ses anges gardiens Sacha Rhoul, Jean Basselin, Laurent Lavige. Casa éditions 208p.  

 

 

 


Le coin BD sexy

Remercions le ciel que nous puissions nous divertir vers le bas...avec des lectures d’une seule main et qui plus est magnifiquement illustrées en BD par Tabou qui nous offre trois titres et de quoi éveiller une libido endormie par la pandémie. Commençons par Une journée bien remplie de Jean M. Sanmiguel. Cet espagnol met en scène trois jeunes déesses, Clara, Rachel et Kaori, qui ont décidé d’une interprétation toute personnelle de la fièvre du vendredi soir.  Et qui se prolonge parfois tout le week-end. Elles connaissent toutes les ressources de leur anatomie et chaque orifice est bien occupé Nous avons particulièrement apprécié les formes et la hardiesse de la jeune Kaori. Dans le genre érotique le bédéiste tutoie ici l’excellence.

Un autre bédéiste Erich Hartmann qui vit non loin de son prédécesseur aux Îles Canaries. Il est professeur de dessin. Sacha Guitry avait eu un mot indélicat en ce qui avait trait aux enseignants en disant que ceux qui peuvent font, ceux qui ne peuvent pas enseignent. Eh bien notre cher Erich oppose un sérieux démenti depuis longtemps et le prouve encore une fois magistralement avec le tome 1 de Orgies Barbares. Le titre à lui seul annonce la couleur. Et ne vous inquiétez pas si vous arrivez trop vite à la fin de l’album, il nous promet une suite de six autres. L’auteur s’inspire de l’esprit du moyen-âge et de contes fantastiques. Un joyeux cocktail où l’oeuvre de chair s’accomplit avec un beau déploiement qui ravira votre regard messieurs et dames.

Le Toscan Gabriele Di Caro est en verve, débarquant avec sa saga en trois tomes Les Arcanes de la Maison Fleury avec un tome ayant pour titre, “Le Rossignol”.  Nous sommes ici dans le Londres brumeux de la fin du XIXème siècle.  Au moment où sévissait le terrible Jack L’éventreur qui, comme on sait, était un tueur en série du côté des belles de nuit. Un commissaire, frustré, veut en découdre. Et son enquête le mènera du côté de la maison de débauche de Madame Fleury, établissement de grande tenue. Vous verrez comment les filles occupent leur temps. Très agréablement d’ailleurs, illustrations délicieuses à l’appui.

 






 


Le coin de la BD

Le Far West est un terreau fertile en histoires de tout genre. C’est certain que le duo Thierry Gloris à la scénarisation et le québécois Jacques Lamontagne n’ont pas été atteints par le syndrome de la page blanche. Ils nous offrent dans Wild West chez Dupuis une plongée dans les affres de la conquête de l’Ouest. Le tome 2 qui paraît “Wild Bill”. Ce Bill qui est un justicier qui sera à la traque de la célèbre Calamity Jane. On verra au travail ce fameux chasseur de primes répondant au nom de Bill Hickock. Disons pour faire court que l’on ne faisait pas l’économie de balles à cette époque. De l’action presque à chaque planche. Comme on aime quoi.

La BD sait parfois s’emparer des classiques de la littérature et faire merveille. Par exemple ce fameux roman d’aventure Moby Dick de Herman Melville revu par Bill Sienkiewicz. Si vous ne connaissez pas l’histoire, le titre l’emprunte à une baleine blanche qui aurait arraché jadis la jambe du capitaine Achab. Au cinéma on se souviendra que ce dernier était interprété par le regretté Gregory Peck. Achab s’embarque donc avec un philanthrope excentrique prénommé Ismaël. Les deux sont ensemble sur le navire baptisé Pequot, mais pas animé des mêmes intentions. La BD reflète à la ligne près ce récit marin. Du bonbon dans le genre. C’est chez l’éditeur Delcourt.

Et chez l’éditeur Vents d’Ouest,  le tandem Éric Summer et Miriam Gambino nous font découvrir une bande de petits futés dans Eugénie et les Mystères de Paris. Cette Eugénie à tout juste 13 ans mais c’est, comme on dirait, une bolée. Qui vit avec un oncle policier, Edmond. Un brave type, mais côté déduction il n’était pas là quand le talent du limier est passé. Tout le contraire de sa nièce qui sait résoudre des énigmes. En compagnie de petits copains, elle va créer la “Confrérie de Vidocq” où les potes vont s’amuser à jouer aux détectives. Dans ce Paris de 1885 on vient de dérober des caisses contenant les morceaux de la Statue de la Liberté offerte par la France aux États-Unis. Tout un contrat pour cette joyeuse équipée.

 









 


Le coin santé physique et psychique

L’autre jour, quelqu’un de la rédaction faisait remarquer à quel point, les gens scotchés à leur portable ne regardaient plus personne, comme une négation totale de l’autre. Eh bien vous n’êtes pas seul à faire ce constat. Engagée dans la justice sociale Agathe Cagé reprend le même constat de ce déficit d’altérité dans son petit pamphlet Respect! Elle reprend en boucle certains de nos comportements. L’aliénation est tel qu’on en est arrivé à se moquer de ceux qui ont de l’empathie pour d’autres. Elle clame de tous ses voeux la considération. Pas de formule magique, seulement le retour d’un civisme social pour un mieux vivre ensemble. C’est aux éditions des Équateurs.

Aux éditions Novalis un titre qui tombe à point nommé au moment où les gouvernements mondiaux brandissent la mort à tour de bras dans le cadre de la pandémie de la Covid-19. Et ce terrorisme sanitaire a réussi car, tétanisés par la perspective de mourir, nous n’assistons à aucun grand soulǜement populaire contre ces restrictions liberticides. Ce livre c’est Pourquoi avons-nous si peur de la mort ? de Joël Pralong qui est prêtre et supérieur du Séminaire de Sion en Suisse. Il est infirmier de formation. A le lire, car il est un soignant d’origine, il reprend le constat de l’archevêque de Paris, lui médecin, qui avait pu voir sur le terrain cette frousse mortifère.  Il est un fait que l’on a totalement évacué la mort de nos vies, les rituels funéraires se déroulant à une telle vitesse qu’on a l’impression d’être immortels.  Et pour rassurer, le pasteur cite les Écritures gorgées de passages rassurants sur les fins dernières.

Les réflexions d’un pitou. Voilà ce qu’on trouve dans Le chien thérapeute alors qu’un labrador, Lol, parle à la première personne, racontant comment il est au service du judiciaire dans mille et une situations. C’est une initiative de Frédéric Almendros procureur de la République à Cahors.  Il est un propagandiste du recours à des escouades canines pour faciliter le travail des corps policiers.  On savait le chien meilleur ami de l’homme. C’est mieux que ce que l’on pensait.  C’est aux éditions Favre.

Voici une démarche originale qui provient d’un psychiatre. Normalement, ils vous expédient une ordonnance prenant à peine le temps de vous écouter. Ici le docteur Jean-Marc Mantel pousse l’écoute à d’abord s’écouter soi-même par La pratique spirituelle titre de sou ouvrage qui sort aux éditions Accarias. Le livre se présente en forme de questions réponses qui dynamise la lecture et donne de la proximité aux théories exprimées. Il est beaucoup question de l’effort ou non à investir dans cette pratique, car on penche souvent pour des effets immédiats sans beaucoup d’investissement de soi-même.  L’auteur est disciple de la sagesse indienne. D’ailleurs il recourt à des citations pour appuyer ses assertions.

Aux éditions Michel Lafon, une hypnothérapeute Vanessa Carrara-Douillet lance un appel à retrouver la voix intérieure de l’enfant que nous sommes.  Car ne dit-on pas que la personnalité se forge entre zéro et trois ans ? Et que souvent on traîne aussi son boulet d’enfance toute sa vie. Hélas on musèle cette petite voix sous des dehors d’adultes accomplis. Dans son essai Second souffle elle recommande d’écouter l’enfant en soi. Une façon de désencombrer sa vie. Elle fait part de ses différentes expériences en cabinet.

Chez l’éditeur Alisio,  un titre intriguant Les gentils aussi méritent de réussir de Yannick Alain en compagnie de Jérôme Hoarau et Delphine Castellani. Il y a des gens que nous connaissons à la rédaction que les gens gentils entretiennent leur cancer car refoulant intensément ils implosent. Eh bien nos auteur prétendent le contraire, à savoir que la gentillesse est gratifiante et rapporte dans ce qu’il y a de plus positif. C’est une proposition qui mérite d’être lue car Yannick Alain est entrepreneur à succès et il ne l’a pas toujours eu facile. Il est de ceux qui ont assimilé la notion de la loi de l’attraction. Et qu’on ne perd rien, mais vraiment rien à être gentils avec nos contemporains.

 

Avec la distanciation imposée par les autorités sanitaires en période de pandémie, le toucher les fait frémir d’horrreur. Et pourtant dieu sait qu’une main apaisante fait tellement du bien. Que ne viendra pas démentir Andrée West infirmière qui arrive avec Le toucher thérapeutique un processus naturel de guérison.  Et à cette lecture on a peine à imaginer tout le bienfait dans le détail que procure une thérapie manuelle. C’est que ce bien-être se diffuse partout. A lire aux éditions du  Dauphin Blanc.

 

 

 


Pour pénétrer ce Japon si mystérieux

A vrai dire que sait-on du Japon mis à part les images d’Épinal concernant ce mystérieux pays qui attise même la curiosité d’autres pays asiatiques ? Pas grand chose. On est souvent presque dans la caricature. Que sait-on par exemple du rapport au corps venant des nippones. Une impudicité qui a frappé les premiers explorateurs étrangers. Un qui connaît les moeurs japonaises sur le bout des doigts, est le professeur de géographie à l’Université Lyon 2 Philippe Pelletier. Il nous livre un ouvrage remarquable La fascination du Japon. Une mine de renseignements, beaucoup historiques, qui nous aide à dresser un portrait plus éclairé du pays et de ses habitants. Déjà au XVIème siècle un religieux avait observé que les couvents de nonnes japonaises servaient de bordels...Vous ne serez pas au bout de vos surprises. Dire que nous avons aimé est un euphémisme. A mettre au-dessus de votre pile de futurs achats de livres. Et si notre guide nourrissait le désir de nous intéresser à voir le Japon de près, il a réussi son pari.

La fascination du Japon Idées reçues sur l’archipel japonais. Le Cavalier bleu 325p.    www.lecavalierbleu.com

 

 

 


Dans les pas parisiens de Napoléon

2021 qui commémore le bicentenaire de la mort de l’Empereur des français, voit la publication d’une pléthore de titres abordant tous les aspects de cette vie hors du commun. Il fallait bien que les éditions Alexandrines entrent dans la ronde avec leur célébrissime collection “Le Paris de…” qui nous fait arpenter historiquement les résidences, lieux et places publiques que de grosses pointures ont emprunté. Il y a longtemps que nous n’avions fait de compte-rendu d’un de ces titres. C’est un beau numéro qui nous parvient dans un format un peu plus agrandi que ce que nous connaissions. Qui, en raison de ses plus grands caractères, en facilite la lecture. C’est donc Napoléon qui a les honneurs. C’est le cas de le dire, on le suit pas à pas, encore jeune adolescent quand il fréquente la capitale pour la première fois. Entre autres choses on apprend qu’il séjourna tout à côté d’Olympe de Gouges la réputée féministe, au 13 de la rue du Mail. C’est un tout autre Paris qui se présentait aux yeux du Corse sans le boulevard Saint-Michel, ni Saint-Germain. Pascale Fautrier à qui on doit ce petit bijou d’historiographie, portraiture parfaitement le paysage d’alors. A nous de nous faire après coup des images.

Le Paris de Napoléon Pascale Fautrier. Éditions Alexandrines 173p.      www.alexandrines.fr

 

 

 


Le vagin n’avait pas dit son dernier mot

Faut croire que le vagin, mot honni depuis le début de l’humanité, avait encore à se faire entendre. Qui n’a pas entendu parler de ces fameux Monologues du vagin créés il y a vingt ans par Eve Ensler qui à leur façon ont agi comme une sorte de tsunami. Pour une fois, on n’avait plus honte de faire référence à l’organe féminin, que si peu de femmes même exploraient. Et l’auteure a eu cette surprise à laquelle elle ne s’attendait pas. Oui on l’a félicitait pour la libération de la parole, mais surtout cela a agi comme un exutoire pour quantité de femmes qui ont exprimé des agressions sexuelles dont elles avaient été l’objet.  Le vagin a été aussi, le lieu du crime. A l’origine on comptait dix-neuf monologues. Fort de ce retentissement, dame Ensler complète avec une réédition comprenant onze monologues inédits. Ce qui suppose une relance de nouvelles prestations publiques avec des comédiennes de tous les horizons. L’occasion aussi pour la présente jeune génération de faire connaissance avec ce livre culte qui est une célébration des blasons du corps féminin, le vagin en étant peut-être le plus illustre.

Les monologues du vagin Édition intégrale. Eve Ensler. Denoël 187p.    www.denoel.fr

 

 

 


La rencontre improbable d’un rescapé du suicide et d’un enfant leucémique

Autant vous le dire tout de suite, nous ne pouvions pas être partial pour ce qui concerne Jasmin Roy tant nous nous sentons redevables envers cet homme, pionnier québécois de la lutte contre l’intimidation. Et dont le rayonnement s’est rendu notamment jusqu’en France. Un être qui, parce qu’il a été éprouvé au plus profond de lui-même. ne peut que compatir à la détresse humaine. Et c’est ce qu’il traduit dans son premier roman 20 et une nuits. Le décor, un hôpital. S’y trouve un quinquagénaire, Xavier, qui a tenté de mettre fin à ses jours. Et il aura un visiteur en la personne d’un garçonnet âgé de neuf ans, Gabriel, au stade final d’une leucémie. Ses jours sont comptés. Tout un rapport va s’installer entre ces deux êtres, meurtris par l’existence. Une série de rencontres qui va s’étaler sur vingt nuits. Pourquoi alors ce titre qui fait référence à vingt et une nuits ? Vous le verrez en le lisant. Toute une dualité entre un qui voulait ne plus vivre et l’autre qui lutte pour conserver la sienne. Quel beau film en perspective. Avis aux producteurs en manque d’inspiration. Comme première incursion dans le genre du roman, Roy excelle. Il n’a certainement pas été confronté au drame de la page blanche tant il est un expert en émotions. Restait à les coucher sur papier. Exercice réussi.

20 et une nuits  Jasmin Roy. Michel Lafon 157p.     www.michel-lafon.ca

 

 

 


Une charge de Delphine de Vigan contre les dérives des réseaux sociaux

Il était une fois Mélanie, addict aux téléréalités, particulièrement Loft Story. Elle idolâtre Loana. Elle fera une expérience cuisante en participant elle-même à une de ces émissions voyeuristes. Les années passent. Elle a deux enfants, Kimmy et Sammy. Elle va les exploiter au sens le pire du verbe, en créant sa chaîne Youtube “Happy” dans laquelle ses rejetons vont être utilisés à toutes les sauces et pas des meilleures. Gavés de cadeaux au superlatif. Pourris par des commanditaires. Des scènes à vous effrayer de voir comment on peut plonger des touts petits dans l’enfer de la consommation. Il arrivera que Kimmy sera porté disparu. Entre en scène Clara, de la Brigade criminelle.  Les enfants sont rois de Delphine de Vigan est un roman certes, mais tient du documentaire. Car ce qu’elle dénonce existe réellement. Cela fait penser à cette autre exploitation d’enfants prépubères qui participent aux États-Unis à des concours de beauté. Pathétique. C’est ainsi que les hommes vivent, écrivait hélas le poète.  Une véritable charge de la romancière contre les dérives des réseaux sociaux.

Les enfants sont rois Delphine de Vigan. Gallimard 348p.   

 

 

 


On a sondé onze femmes incomprises

Ils sont deux Laura El Makki qui enseigne l’écriture biographique à Sciences-Po  et Pierre Grillet un parolier qui a bossé avec pleins de pointures de la chanson française dont l’incontournable Johnny vous savez qui. A quatre mains donc, pour nous livrer onze portraits de femmes Les incomprises qui nous remet en mémoire deux choses, la célèbre sentence de Simone de Beauvoir quand elle disait qu’on ne naît pas femme, qu’on le devient et aussi que les plus belles histoires commence par un non. Ils ont ratissé large les auteurs, allant de Niki de Saint-Phalle à Marilyn Monroe en passant par Sylvia Plath. Pour chacune, une courte monographie suivie d’un texte choisi, écrit par chacune de ces femmes qui jette un éclairage sur l’âme de la personne. Elles ont toutes en commun de ne pas l’avoir eu facile dès le départ. On dit qu’on ne se débarrasse pas de son enfance. A la lecture de ces mini biographies on serait porté à le vérifier. Mais en même temps, il y a des battantes.  Pour des femmes qui en arrachent, ce pourra être autant d’encouragements à ne pas céder. Pour les lecteurs masculins, de vérifier à quelle enseigne ces représentantes qu’on qualifiaient horriblement jadis du “sexe faible” ont été bien au contraire, des femmes fortes, défiant le destin auquel on les prédestinait. En fin de bouquins, pour ceux et celles qui voudraient approfondir la connaissance de ces personnalités, on vous a mis une petite bibliographie.

Les incomprises Laura El Makki et Pierre Grillet. Michel Lafon 189p.  www.michel-lafon.com

 

 

 


François Dompierre se raconte, lui et son époque

Le compositeur  François Dompierre a une feuille de route remarquable et il a été et est encore un acteur majeur du paysage artistique québécois, que l’on songe seulement à la comédie musicale Demain matin, Montréal m’attend. Il est rendu à l’âge d’avoir des souvenirs. et pas mal même. De son enfance dans l’Outaouais, dans un milieu qui favorisait, l’écoute de la musique et l’apprentissage d’un instrument. Jeune garçon, il touchait à peine du pied le pédalier de l’orgue. Mais avec un brio remarqué. Il va faire un cursus obligé, mais on ne va pas lui dérouler le tapis rouge pour autant. Il va ramer à accompagner toutes sortes d’artistes, dans des bouges comme des salles un peu plus respectables. Il livre dans ces pages sa reconnaissance à un André Lejeune que l’establishment de la musique d’ici pouvait prendre de haut, lui l’animateur chevronné des campings. Mais c’est cet homme qui lui fera obtenir plusieurs contrats. Et Dompierre de nous révéler sa passion de la musique country, portant en haute estime un Willie Lamothe. C’est dans la publicité que le maître de la partition fera d’argent, beaucoup d’argent même. Et qui lui permettra de satisfaire à son second plus grand plaisir, la cuisine. Une passion qui confine à l’addiction pour des plats raffinés à l’extrême, arrosé de grandes bouteilles. A le lire, le paradis existerait sur terre.  Il nous partage même quelques recettes. Il nous parle de ses collaborations, avec une Renée Claude entre autres, exigeante comme ça n’est pas permis. Un Stéphane Venne avec un ego plus grand que nature. C’est toute une fresque de la vie musicale d’une époque qui défile sous nos yeux, à commencer par celle des fameuses boîtes à chansons. Il nous parle d’un temps qu’évidemment les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, d’où la nécessité de l’entendre.

Amours, délices et orgues François Dompierre.Les éditions La Presse 363p.     www.lapresse.ca

 

 

 


Auto-interrogatoire de Noëlle Châtelet sur le corps

Elle le sait très bien elle-même, une grande partie de son investissement en littérature porte sur le corps. Et Noëlle Châtelet ne lâche pas prise car Laisse courir ta main est un autre opus sur ce thème qui lui est cher. De son intérêt pour le squelette présenté en classe jusqu’aux effets de la création théâtrale sur l’âme et le corps. Elle a choisi toutefois un angle original, celui où clouée comme elle le dit un lit d’hôpital, elle se convoque elle-même pour porter plainte contre X, ce qu’on appelle en terme juridique une main courante. Elle ne se fait pas de cadeau, ne se ménage pas, et à son tour fait plus souvent qu’autrement fait taire son interlocuteur. En sa compagnie une autre appréciation du corps humain qui l’obsède tant.

Laisse courir ta main Noëlle Châtelet. Seuil 262p.       www.seuil.com

 

 

 


Françoise Hardy par les textes

C’est une démarche que font plusieurs auteurs-compositeurs-interprètes à l’heure des bilans de carrière, décrire par le menu tout ce qui a présidé à la naissance de leurs chansons. Charles Aznavour entre autres en a fait une parfaite illustration. De savoir dans quel contexte avait été composé  “Je m’voyais déjà” ou “La bohème”.  Il en va de même pour Françoise Hardy qui se prête avec un talent de conteuse à cet exercice. Cela donne Chansons sur toi et nous. Dans le communiqué de presse accompagnant la sortie de l’ouvrage, elle est présentée à juste titre comme une chanteuse littéraire et iconique. Retenons le qualificatif littéraire. Car ce qui saute aux yeux c’est précisément la qualité des textes. Les mots ne sont pas là que pour le plaisir d’une belle rime. Ce sont des mots messages. Le plaisir d’abord de lire le texte et ensuite de repasser le disque auquel se superposera cette voix qu’elle désignait comme petite, avec sa grande lucidité, mais juste. En même temps que le moment de naissance des chansons, elle se fait historienne dee différentes époques. Les fans de la Hardy ont un trésor entre les mains. Pour les autres qui iront à sa découverte, c’est une formidable introduction à son oeuvre.

Chansons sur toi et nous Françoise Hardy. Équateurs 429p.    www.editionsdesequateurs.fr

 

 

 


Tout un joyeux casse-tête de modèles financiers

Vous avez la bosse des maths et aimez la finance mais vous n’aviez pas envie de vous taper le doctorat, faute de temps, alors voici une introduction à des modèles financiers proposée par Issouf Soumaré, professeur titulaire et directeur du Laboratoire d’ingénierie financière à l’Université Laval.  Son ouvrage didactique a pour titre Prise de décision financière avec pour auditoire ciblé les étudiants qui entreprennent une première année en doctorat de finance ou ceux de maîtrise.  Habituellement nous ne traitons pas dans nos colonnes d’ouvrages trop hermétiques, mais celui-ci avec cette somme de calculs algébriques nous a littéralement ébloui. Nous nous sommes dits à la rédaction, soyons démocratiques et mettons nous dans la peau de ceux qui éprouvent un bonheur à tenter de résoudre des équations diaboliques comme le paradoxe de Saint-Pétersbourg. Et si vous avez le tournis rien qu’avec cette entrée en matière, attendez le reste. Saluons ici cet exercice logarithmique présenté de main de maître.

Prise de décision financière Issouf Soumaré. Presses de l’Université Laval 154p.    www.pulaval.com

 

 

 


Philippe Dufresne se penche sur l’ogre des Ardennes

Michel Fourniret a hérité du sinistre surnom d’ogre des Ardennes. On parle d’une vingtaine de victimes, voire plus, toutes des jeunes filles qui devaient être idéalement vierges pour assouvir les fantasmes de ce prédateur de chair fraîche. Et qui montait ses traquenards avec la complicité de sa compagne Monique Olivier. Cette dernière a délié sa langue pour éclairer certains de ces meurtres crapuleux. Actuellement la justice a relancé l’enquête sur le cas d’Estelle Mouzin. L’actualité nous revient sans cesse sur ce monstre car de mois en mois, on plonge de plus en plus dans l’horreur. Et la caractéristique de ce couple maudit est d’être des manipulateurs de première, Fourniret se permettant même de crâner dans une sorte de jeu du chat et de la souris. Mais le temps compte car ce dernier semble présenter des symptômes de sénilité et il n’est pas sûr qu’on verra toute la lumière. Entre-temps pour en connaître davantage sur ce personnage d’une inhumanité foncière il faut lire ce que raconte Philippe Dufresne dans Fourniret vérités et mensonges présenté dans la collection des grands crimes piloté par Jacques Pradel chez l’éditeur JPO.

Fourniret vérités et mensonges Philippe Fourniret. JPO 191p.      www.editions-jpo.com

 

 

 


Crime dans les cimes enneigé

Pour son premier roman, même son tout premier livre, la maison d’édition n’a pas lésiné sur les moyens pour faire connaître Hors piste de Allie Reynolds. Pour son premier sujet, elle a choisi un décor qu’elle connaît bien, les Alpes. En effet la romancière novice est une ancienne championne de snowboard, et à ce titre elle a fait de la compétition entre autres dans les Alpes françaises. Au point de départ, ce sont six adeptes des hautes cimes qui se retrouvent le temps d’un week-end dans ce beau panorama enneigé de France. Mais il arrivera que Saskia disparaîtra. Parle t-on de crime, d’accident. glissé malencontreusement ou poussé dans une crevasse abyssale ? Une enquête démarre. Et comme dans ce genre de thriller à la Poirot on regarde d’abord chez les cinq participants restants de ce week-end funeste. On comprend à la lecture pourquoi l’éditeur s’est senti dans la nécessité de claironner détenir un bijoux du genre entre ces mains. Une star du polar est née.

Hors piste Allie Reynolds. Calmann Levy 425p.     www.calmann-levy-noir.fr

 

 

 


Une étude sur les pèlerinages

Ce qu’il y a de formidable avec le livre, c’est qu’il n’y a pas de limite de curiosité. Toute l’activité humaine est scrutée dans ses moindres replis. Un bel exemple nous vient avec Pèlerinage, marche pèlerine et marche de longue durée au Québec sous la codirection de Éric Laliberté et Michel O’Neill. Le premier doctorant en théologie, s’est fait une niche de spécialisation concernant les pèlerinages. Le second vient de la sociologie et de la santé publique. Retraité, il s’est tourné vers les phénomènes religieux.  A eux deux ils ont réuni un aréopage de chercheurs qui s’intéressent comme eux à la question des pèlerinages. On sait que le fameux chemin de Compostelle qui a donné le “la” à cet engouement, s’est répercuté jusqu’à chez nous. Qu’on se souvienne d’une foule d’artistes québécois qui ont tenu à emprunter cette célébrissime route. Et pour divers motifs qui n’ont pas nécessairement de liens directs avec la Foi. Et ce sont toutes ces motivations variées qui intéressent les participants à cet essai.

Pèlerinage, marche pèlerine et marche de longue durée au Québec Collectif sous la direction de Éric Laliberté et Michel O’Neill. Presses de l’Université Laval 330p.      www.pulaval.com

 

 

 


La double vie d’Eugène Seers alias Louis Dantin

En 2013 paraissait aux éditions Del Busso un brûlot, qui a eu l’effet d’une bombe dans le milieu littéraire québécois. En effet Yvette Francoli soutenait que Émile Nelligan n’était pas l’auteur de ses poèmes, qu’ils étaient le fruit d’Eugène Seers (1865-1945) qui publia du temps où il était religieux au sein de la communauté des Père du Très-Sacrement à Montréal le jeune poète créateur du Vaisseau d’or dans la revue de la communauté. Qui était donc de cet homme, prétendument écrivain fantôme de notre illustre poète national ? Pierre Hébert, professeur émérite de l’Université de Sherbrooke, lui consacre une imposante biographie basée sur sa longue correspondance forte de 2,500 lettres et 400 études critiques. Car sous le pseudonyme de Louis Dantin, il a été le plus important critique littéraire au Québec dans les années trente. Mais le gars avait un problème avec le voeu de chasteté et ne se contentait pas d’écarts seulement par omission. La contemplation de l’hostie sainte s’accommode mal avec la vénération du corps féminin. Il s’exilera donc à Boston avec une compagne et travaillera durant dix-neuf ans aux presses de l’imprimerie de l’Université Harvard.  Dire que c’est une vie hors du commun fait cliché et pourtant c’est la seule expression qui tienne pour décrire son existence. Allez à la rencontre du “découvreur” d’Émile Nelligan.

Vie(s) d’Eugène Seers/Louis Dantin Pierre Hébert. Presses de l’Université Laval 583p.     www.pulaval.com

 

 

 


Il était une fois L’Illustration

De 1870 à 1939 la France pouvait s’enorgueillir de la circulation du plus grand hebdomadaire de photojournalisme dans le monde, L’Illustration qui de 1870 à 1939 sera distribué dans plus de 150 pays, ce qui en soi était un exploit d’édition. Que l’on doit à René Baschet dont le père était lui-même éditeur. Grâce à ce merveilleux véhicule imprimé, le lecteur, confortablement assis dans son salon, pouvait parcourir le monde, de la Tunisie au Pôle Nord en passant par l’Égypte et les États-Unis. On savait s’entourer des meilleurs illustrateurs. Quelle qualité de dessin qui faisait dans l’hyperréalisme. Et puis quand la photographie est venue, eh bien là on concrétisait l’adage qu’une image valait mille mots. Grâce à Jean-Louis Festjens, les éditions Michel Lafon nous offrent une superbe plongée dans le temps. Et en plus des reproductions, il y a aussi les reportages en eux-mêmes.  Le grand patron savait s’entourer des plus belles plumes. Et on compta même de grands collaborateurs comme Maupassant et Zola. Toute une épopée journalistique revit sous nos yeux. Et puis il y a avait un zeste de tonalité colonialiste dans le propos. C’est pourquoi chez Lafon on a ouvert par une mise en garde que les propos lus reflètent une époque et n’engagent pas la maison d’édition. C’est un livre d’art qu’il nous est donné de parcourir. Et on a mis un soin jaloux au niveau de l’impression. Un bel écrin pour un produit superbe.

L’Illustration voyages extraordinaires Michel Lafon www.michel-lafon.com

 

 

 


Tout savoir sur les cavernes du Québec

Le Québec souterrain est méconnu du plus grand nombre. Et pourtant, qu’est-ce qu’il y a à apprendre sur la faune dans nos cavernes. Michel Beaupré et Daniel Caron les connaissent bien et se font fort de les faire découvrir au plus grand nombre. Les deux spéléologues ont sillonné ces lieux mystérieux depuis 50 ans. Ils publient le fruit de ce savoir dans ce merveilleux guide spéléologie Cavernes du Québec. Des dizaines d’endroits pour qui on a établi une fiche signalétique. Et aussi excusez le jeu de mot facile, une “mine” de renseignements. Quelle température fait-il dans ses profondeurs ? Vous saurez tout des opilions, des bibittes à grandes pattes qui tapissent les parois, les recouvrent même. La maison d’édition a mis toutes ses ressources pour produire un beau livre avec des photos aux couleurs saisissantes. Un de nos collaborateurs qui ne manquent pas d’esprit, nous a fait rire en disant qu’on a intérêt à connaître nos cavernes, car avec toutes ces restrictions pandémiques ce sera peut-être le dernier refuge où vivre librement.

Cavernes du Québec Guide de spéléologie. Michel Beaupré et Daniel Caron. Éditions Michel Quintin 366p.       www.editionsmichelquintin.com

 

 

 


Un éternel Treblinka pour nos bêtes

Docteur en théologie et ancien élève de l’école biblique de Jérusalem Alain Delaye a trouvé un titre choc pour attiser notre curiosité Les animaux vont en enfer.Pas à prendre au sens de a contrario du paradis, mais bien de l’enfer sur terre auquel ils sont confrontés. Citant un juif, qui pour illustrer le niveau de maltraitance universelle des bêtes comparait leur sort à un éternel Treblinka du nom du sinistre camp de la mort nazi. Dans son pamphlet l’essayiste qui est végétarien comme sa conjointe s’attache à décrire la relation entre les diverses religions et spiritualité face à la consommation carnée. Il rappelle que Jésus s’en était pris de son temps aux abattoirs. C’est un petit cours d’histoire fort intéressant. Des Père de l’Église interdisaient à leurs moines de se nourrir de chair animale pour se renforcer et lutter contre les tentations de faire bombance. On nous promène de l’Inde à la Chine, en rappelant que les mondes musulman et juif ont proscrits la viande porc. Delaye souhaite au final du bonheur terrestre à nos animaux. Un livre qui devrait a priori toucher un vaste lectorat qui se conscientise de plus en plus à ce propos.

Les animaux vont en enfer  Alain Delaye. Accarias 188p.    www.originel-accarias.com

 

 

 


Pandémies, on n’en a pas terminé

La question est sur toutes les lèvres, quand va t-on en finir avec ce Coronavirus-19 et de quelle façon tout ça va se terminer. Eh bien si on en juge par La fabrique des pandémies un livre choc de la journaliste Marie-Monique Robin avec la collaboration de Serge Morand chercheur au CNRS, si on ne s’occupe pas de la préservation de la biodiversité, on n’en aura pas fini avec les pandémies qui vont se succéder et qui vont sceller le sort de l’homme. Exemple, à cause de l’homo sapiens prédateur de tout, les chauves-souris deviennent stressées et deviennent vecteurs. Et des peuples africains en mangent! Oh, là, là. Marcher sur le sol pieds nus comme dans beaucoup d’endroits dans le monde, est une façon pour des vers intestinaux de s’infiltrer dans notre organisme et de faire des ravages, ou parfois de renforcer le système immunitaire, c’est selon. Bref, c’est le soin mis à sauver l’écosystème qui pourra nous assurer des lendemains qui chantent sinon bonjour les grands dégâts et des confinements à perpète.

La fabrique des pandémies Marie-Monique Robin avec la collaboration de Serge Morand. La Découverte 343p.      www.editionsladecouverte.fr

 

 

 


C’était son arrière-grand-père kabyle mort à Verdun en 1917

Avant de devenir Xavier Le Clerc pour le monde des lettres, il avait gardé son véritable nom de Hamid Aït-Taleb pour son premier roman “De grâce”. chez Lattès. Natif d’Algérie, il rend hommage à son arrière-grand-père Saïd, un kabyle qui a servi la France contre les teutons et qui est mort au front en 1917. Un aïeul qui s’était enrôlé pour apporter un mieux-être aux siens, ne serait-ce qu’une maigre prime de veuve qui donne son nom au titre Cent vingt francs. Il est indiqué roman. En fait, c’est une autofiction réalisée à partir de faits réels. Il retrace le parcours de ce brave ancêtre. Un récit court mais pétri d’humanité et qui est un plaidoyer pour la paix. Dès les premières lignes où Saïd transperce de sa baïonnette un allemand aux yeux bleus donne le ton.

Cent vingt francs Xavier Le Clerc. Gallimard 144p.  

 

 

 


Un conducteur de métro parisien qui lit dans les têtes de ses passagers

Il y a bien des chemins pour faire de la littérature. Surtout de l’imagination. Sébastien Ortiz en a à revendre, qui a conçu un conducteur de la ligne 11 du métro de Paris doté d’un don particulier, celui de pouvoir lire dans la tête de ses passagers. Châtelet-Lilas est constitué de chapitres portant chacun le nom d’une station. Qui évoque pour le narrateur qui parle à la première personne, toutes sortes d’anecdotes. Il est très observateur des bipèdes que nous sommes. Il nous examine comme un entomologiste ferait avec les fourmis. Parfois il y a de ces amalgames comme lorsqu’il raconte ce fait de 1819 où un fêlé du ciboulot s’amusait à piquer les fesses des belles dans les lieux publics. On ne lui avait jamais mis le grappin dessus. Ce qui lui fait dire que s’il avait été à bord d’une rame de sa ligne pendant qu’il conduisait, il l’aurait repéré illico. On s’amuse bien de ses descriptions. Il nous fait passer un sacré bon temps. En ces temps de morosité, merci l’écrivain de nous divertir de la sorte.

Châtelet-Lilas Sébastien Ortiz. Gallimard 201p.   

 

 

 


Des trucs pour égayer les marmots

Ils sont deux Patrick Luneau cinéaste animalier et Manon Luneau éducatrice à l’environnement qui ont rassemblé dans un livre Tous dehors! en ville,  c’est pas moins de 60 activités à faire pour occuper les jeunes qui en ont marre du confinement et qui ont besoin de prendre un grand bol d’air.  Un de nos collaborateurs à la rédaction s’est remis en mémoire à la vue de ce bouquin ce qu’une religieuse du centre familial où il était en pension exhortait aux petits “allez jouer dehors”. Seule exception, si on faisait de la fièvre. Elle savait à quel point un enfant à un besoin irrépressible de se dégourdir. Donc, on a colligé des activités multiples comme concevoir un sifflet à partir...d’une coquille vide d’escargot. Vous voyez, ça ne manque pas de ressources. Si vous trouvez que c’est merveilleux pour vos enfants, sachez que cela fait partie d’une collection “Tous dehors!” élaborée par les mêmes signataires, avec un environnement différent pour chaque édition.

Tous dehors! en ville Patrick et Manon Luneau. Salamandre.  www.salamandre.org

 

 

 


Sur les lauréats des Prix littéraires du Gouverneur Général

C’est un curieux bouquin qui atterrit sur les rayonnages des librairies intitulé Les grands écrivains du Canada. En réalité ce n’est pas la bonne nomination. Car vous ne verrez nulle part dans ces pages le nom de Michel Tremblay et beaucoup d’autres omissions. En fait, c’est un répertoire qui se limite à tous ceux qui depuis quelques années dans tout le pays, se sont vu décernés des distinctions dans le cadre de l’attribution des prix de la chancellerie du Gouverneur Général. Une façon de faire connaissance, surtout pour les québécois francophones avec des gens de lettres phares du Canada anglais. Car en feuilletant ce gros pavé rédigé dans les deux langues officielles, on mesure notre totale ignorance des écrivains anglophones, et les canadiens anglais inversement pour ce qui concerne les nôtres. Nous retrouvons pour chacun des nominés une courte monographie. Ce travail est dû à Andrew David Irvine assisté d’Edmond Rivère et Stephanie Tolman. Les deux solitudes culturelles sont encore une triste réalité. Heureusement que cette démarche entreprise par les Presses de l’Université d’Ottawa apportera sa petite pierre à l’édifice de notre connaissance mutuelle.

Les grands écrivains du Canada Andrew David Irvine avec la collaboration de Edmond Rivère et Stephanie Tolman. Presses de l’Université d’Ottawa 678p.  www.presses.uottawa.ca

 

 

 


Le livre MeToo de l’inceste

La rentrée de 2021 a été marqué par une véritable bombe littéraire, la parution de La familia grande de Camille Kouchner qui levait le voile dans ce récit sur les actes incestueux posés depuis 1988 par son beau-père sur son frère jumeau dont elle a changé le prénom pour celui de Victor. Ce beau-père est toute une pointure, Olivier Duhamel qui fait partie de la nomenklatura intellectuelle parisienne. Il est marié à la soeur de l’actrice Marie-France Pisier dont on a appris ensuite que la brouille de cette dernière avec sa soeur portait sur les agissements de son beau-frère.  Pour un premier ouvrage de cette avocate dénonciatrice, ça été tout un carton, 225 mille exemplaires en une semaine. Et en même temps le déclencheur d’une sorte de MeToo de l’inceste qui a déferlé comme tsunami. On a pu mesurer l’ampleur de cette déviation dans les familles. Duhamel tout récemment, lui qui niait fermement au début, a admis les actes qui lui sont reprochés. Il a tout perdu de ses postes prestigieux. On connaîtra plus tard ce que lui réservera le bras de la justice. Entre-temps, replongez vous dans ce livre dont on a oublié sa qualité de narration.

La familia grande Camille Kouchner. Seuil 204p.  

 

 

 


50 ans plus tard à la recherche de son enfant

Vous ne connaissez pas l’écrivain islandais Arnaldur Indridason ? Ne vous en faites pas, vous avez une sacrée opportunité de faire la connaissance de celui qui a été historien de formation et critique cinématographique. Et sa conversion dans les lettres lui a réussi avec 14 millions de lecteurs à son palmarès. Et ça ne risque pas de décroître avec sa nouvelle ponte, la pierre du remords. L’histoire d’une femme, Valborg qui alors qu’elle était barmaid voilà cinquante ans passés, avait été violée dans un bar. Elle avait ensuite donné naissance à un enfant qu’elle avait dû abandonner.  Cette Valborg sera retrouvée assassinée. L’étrangeté de l’affaire, c’est que peu avant sa mort violente, elle avait contacté un enquêteur, Konrad. Pour lui demander de retracer cet enfant, savoir ce qu’il est devenu. Son premier mouvement avait été de répondre par la négative. Mais quand il apprendra le triste sort de l’infortunée, pris de remords, il donnera suite. Et il ne sera pas au bout de ses surprises. On voit que l’écrivain, passionné de cinéma, sait que, tout comme pour un film, le succès d’un polar tient à l’histoire qu’il raconte. Et là il nous offre une bonbonnière du genre.

La pierre du remords Arnaldur Indridason. Éditions Métailié 344p.   

 

 

 


Un passé nazi qui hante

L’écrivain allemand Chris Kraus à qui on doit le best-seller “La fabrique des salauds” exploite dans Baiser ou faire des films une hantise, devenue moins tabou au fil des générations, à savoir à quoi s’occupaient nos aïeuls du temps du Troisième Reich ? Ici c’est l’histoire d’un étudiant allemand en cinéma, Jonas, qui débarque dans la Grosse Pomme. Il ne sait pas encore quelle tangente prendra son film-étude. A New York il rencontrera celle nommée entre guillemets sa tante prénommée Paula. Elle en sait un rayon sur le grand-père du jeune homme, un nazi de la pire espèce. Et comme un être humain est toujours complexe, cette brute lui aura quand même sauvé la vie. Ça pourrait faire un bon scénario, mais Jonas n’en a cure de ces histoires anciennes. Sauf que, la vie mettra sur sa route Nele, une jolie jeune femme qui va changer la donne. Comme quoi on a beau vouloir tirer un trait sur le passé, celui-ci peut refaire surface sous un jour inattendu.

Baiser ou faire des films Chris Kraus. Belfond 327p.    www.belfond.fr

 

 

 


La souffrance, le lit du démon

C’est une des réflexions qui vient à l’esprit de ce prisonnier, meurtrier récidiviste, condamné à perpète et que l’on trouve consigné dans son journal. Qui fait le lit de ce premier roman du chroniqueur judiciaire Dimitri Rouchon-Boris Le démon de la colline aux loups”. Le taulard décrypte par le menu la façon dont on fabrique un monstre. Tout part comme toujours de l’enfance. Il a été battu par ses parents, violé, placé en foyer d’accueil. Bref, le cursus classique qui fait de vous un enragé. Sur sa route il va croiser une junkie avec laquelle ce sera une descente en enfer. Comme par malheur, lui la victime, inflige aux autres ce qu’il a connu, et en pire. Il se connaît très bien, et l’écriture sera avant sa mort, son exutoire. C’est un livre coup de poing qui met en exergue la saleté morale de nos sociétés qui se donne bonne conscience, tandis que l’horreur se perpétue.

Le démon de la colline aux loups Dimitri Rouchon-Borie. Le Tripode 237p.

 

 

 


Des perles de sagesse

Le confinement ne vous fait plus rencontrer vos amis, et même avant la pandémie vous n’en aviez pas ? Alors en voici un pour vous, Manuel Vilas qui s’amène avec Alegria. Comment décrire son contenu. Ce sont des réflexions pêle-mêle qui vont dans toutes les directions, mais toujours à l’aune de la plus grande sagesse. La vie lui a appris quelques certitudes et il tenait à nous les partager. Il peut tout aussi bien parler de l’impossibilité de garder longtemps la couleur immaculée des chemises blanches, la couleur favorite de son père, du compositeur Haydn ou de la consommation. Une phrase extraite au hasard donne une identité des perles qu’on y trouve “Si tu ne sais pas renoncer à tout, la vie ne te concède pas sa connaissance, c’est aussi simple que ça “.  Et puis il a un style de proximité qui fait que le lecteur aura l’impression que l’écrivain ne s’adresse qu’à lui. Un disciple de Montaigne à la sauce contemporaine.

Alegria Manuel Vilas. Éditions du sous-sol 398p.    

 

 

 


Qui n’a pas entendu cet adage qu’il fallait casser des oeufs pour faire une omelette. Une rupture de la coque qui amène à autre chose. On n’en dit pas moins, mais à un plus haut niveau, dans cet Abécédaire de la rupture qui est un magistral exercice de style dû à la supervision des Isabelle Fernandes, Henri Galinon, Erwan Roussel, Jean-Philippe Luis, Michel Streith et Nadejda Kriajeva. Des travaux menés au sein de la Maison des sciences de l’Homme de Clermont-Ferrand. A croire qu’ils n’ont rien échappé, de ce qui peut être identifié comme rupture, la maladie, la grève, la guerre,  bien entendu la rupture amoureuse, la réforme, l’effondrement et quoi encore. Prenons le sujet de la grève. On vous expliquera historiquement comment elle est née et on développera ensuite la réflexion. Des textes courts dans l’ensemble mais qui ont le mérite de circonscrire à l’essentiel de ce qui peut amener de réflexion. En même temps on se rend compte que si nous pauvres humains tendons à la stabilité, la rupture est toujours au rendez-vous et est a contrario de la permanence des choses. Le grand mérite de cet essai éclairant, est que le lecteur sort plus intelligent de sa lecture que lorsqu’il y est entré.

Abécédaire de la rupture Collectif. Maison des sciences de l’Homme/Université Clermont Auvergne  392p.  

 

 

 


Une femme hors du commun, l’autre Olympe

Pour l’Histoire, il y a eu Olympe de Gouges, cette grande figure du féminisme. Cette Olympe qui a fait peut-être malgré elle de l’ombre à cette autre Olympe suivi du patronyme Audouard. Qui elle aussi fut une militante aguerrie du droit des femmes. Excusez du peu, elle a fondé non pas un, mais trois quotidiens et une trentaine de livres portent sa signature. Le mâle de son époque ne lui faisait pas peur. Ainsi elle ne se gêna pas pour pourfendre le baron Haussmann qui démolit tant d’immeubles pour ériger ses fameux grands boulevards. Au-delà du désir de modernisme apparent et l’établissement de mesures de salubrité, elle y voyait aussi, larges avenues aidant une manière pour que les forces policières puissent intervenir plus aisément pour contenir les foules de futurs contestataires. Elle fut de même une grande voyageuse allant autant dans le Far West américain qu’au Maghreb. Liesel Schiffer tire de l’oubli cette femme singulière qui pourrait devenir un modèle d’opiniâtreté dans un monde phallocrate au possible qu’était le Second Empire.  Elle aura évidemment de nombreux contempteurs qui voudront l’étiquetée comme la représentante parfaite du troisième sexe. Elle n’en a cure, elle qui a fait un mariage malheureux et qui se consacre davantage à ses causes, au journalisme qu’aux hommes parmi lesquels elle aura son lot d’admirateurs. Quand on dit femme de tous les combats ce n’est pas une figure de style. Elle s’en prend même aux crinolines qu’elle considérait comme des cages pour les femmes. 

Olympe Liesel Schiffer. Vendémiaire 555p.    www.editions-vendemiaire.com

 

 

 


Une psychanalyse de Nelly Arcan

Nous étions doublement curieux de savoir qu’il y avait un essai à saveur psychanalytique sur Nelly Arcan que nous comptons parmi les proches de notre rédaction une femme qui s’est lié d’amitié un temps avec l’auteure de “Putain”. Rappelons que l’écrivaine se suicida à peine âgée de 36 ans. On la retrouva pendue haut et court. Ce fut une onde de choc dans la communauté littéraire québécoise, car elle était souvent invitée sur les plateaux de télé. Où elle jouait une double carte de “bimbo” sexy décolleté à l’avenant, en même temps qu’elle soliloquait sur le rapport au corps. Son désir d’être belle et en même temps sujet de détestation. Elle était l’incarnation de la complexité. Comment être à la fois sex symbol et intello. Les deux peuvent-ils coexister ? En tout cas, une québécoise d’origine Anouchka d’Anna a tenté de lire les messages livrés par celle dont le nom de naissance était au passage Isabelle Fortier. Sémiologue et diplômée en psychanalyse, elle tente de trouver du sens à cette vie météorique. C’est un chantier fabuleux que de tenter d’investir le féminin dans toute sa pluralité, du moins telle que son sujet le vivait. La lecture de cette analyse ne conclut à rien de définitif, mais livre des pistes intéressantes.

Nelly Arcan: la Putain Lacanienne Anouchka d’Anna. Éditions des crépuscules 164p.    www.editionsdescrepuscules.fr

 

 

 


A la rencontre du monde et des autres

L’expression “citoyen du monde” est assez galvaudée tant les montées de nationalismes un peu partout sur la planète, teintées de xénophobie à divers degrés, limitent les individus qui peuvent s’en revendiquer. Il reste de beaux spécimens comme Ahmed Kalouaz un véritable nomade. En quatrième de couverture de son recueil de nouvelles Le violon de Scarlett on peut lire fort à propos de lui qu’il va “à la rencontre du monde et des autres”. Et c’est bien vrai. Curieux comme trois petits capucins. Il se déplace rapidement le mec, au point de penser qu’il a des dons d’ubiquité. C’est qu’il a peut-être la prescience que le temps lui échappe et qu’il faut faire vite afin d’en savoir un peu plus sur les us et coutumes des lieux qu’il visite. La première nouvelle qui donne son titre à l’opuscule, fait référence à Scarlet Rivera, la violoniste de Bob Dylan, à ses yeux une figure de musicienne mythique. Comme tout excellent nouvelliste, il a un sens de l’observation aiguisé. Et il rend ce qu’il voit, comme les écrivains de jadis, d’avant la photographie, qui livrait un luxe de détails pour que nous puissions nous-mêmes nous faire des images. Il y a au fait de très belles images à se faire dans ces pages.

Le violon de Scarlet Ahmed Kalouaz. Le mot et le reste 116p.   

 

 

 


De belles envolées pastorales en mots et en images

C’est fort heureux quand une poétesse comme Émilie Hould se double d’une illustratrice talentueuse, capable de mettre des images sur de belles envolées pastorales comme il s’en trouve dans ce recueil intitulé Terrains fertiles qui démarre sur la réminiscence de l’auteure enfant qui s’émerveille quoique un peu apeurée par la vue d’un coucher de soleil. Il y a beaucoup d’émerveillement dans le regard qu’elle porte sur les choses. Cette faculté de l’enfance ne l’a pas quittée. Vous aimerez cette délicatesse. Les phrases sont comme ces dessins, des touches disposées ça et là. Une économie de moyens au service d’un plus grand message. A suivre cette Émilie.

Terrains fertiles Émilie Hould. Éditions Omri 48p.   www.editionsomri.com

 

 

 


Quand on ne vous aime plus

Un titre cette fois aux éditions de l’Apothéose. Charlotte St-Arnaud qui ferme la trilogie de Lyne Doyon. L’histoire fort bien racontée d’une femme un peu enrobée, à qui tout réussit, et voilà que son bonheur s’écroule comme un château de cartes quand son conjoint lui balance qu’il ne l’aime plus. Elle est courageuse quand même et va passer à travers ce coup du sort. Un bel exemple même pour des lectrices en manque de confiance. Juste petit bémol, la protagoniste est une femme ronde et pourtant sur la couverture on peut voir un joli minois qui ne laisse rien envisager qu’elle soit en surpoids. Et puisque “pandémie” oblige et qu’il est beaucoup question des aînés ces temps-ci, sachez que notre Charlotte, grande âme, viendra épauler une aînée et l’arracher à sa solitude. Un altruisme assez rare pour qu’on le souligne. Et qui rend le personnage encore plus attachant.

Charlotte St-Arnaud Lyne Doyon. Les éditions de l’Apothéose 550p.    www.leseditionsdelapotheose.com

 

 

 


Autour de la plus grande catastrophe naturelle au pays

En mai 2016 la localité de Fort McMurray en Alberta a été le théâtre d’un gigantesque feu de forêt qui avait forcé l’évacuation de toute sa population. On a estimé que les pertes se sont élevées après coup à plus de trois milliards et demi de dollars. On considère cet événement comme à ce jour, la plus grande catastrophe naturelle de l’histoire du pays. Cela a certainement eu un effet sur Isabelle Joannette, une éducatrice spécialisée à la ville, et dit-on dévoreuse de romans. En tout cas, elle n’a pas été confrontée au drame de la page blanche qui hante tout écrivain digne de ce nom.  Car elle s’est inspiré de ce fait divers pour narrer le vécu de sept personnages issus de son imagination qui, chacun, vivront cette tragédie différemment. Évacués nous fait bien voir que l’écrivaine est familière du genre du roman. Elle sait mettre à sa place un sujet, un verbe et son complément. En clair, le plus beau compliment que l’on puisse lui rendre est qu’elle tutoie l’excellence.

Évacués Isabelle Joannette. Les éditions La Plume d’Or  249p.     www.lpd.com

 

 

 


Le péché existe et il est sucré

Un des sept péchés capitaux selon la Sainte Église catholique et Apostolique romaine est la gourmandise. Et comme le diable se cache dans les détails, il prend ici la forme d’un pâtissier répondant au nom de Rémy Couture. Qui s’amène avec pleins de tentations dans son livre Veux-tu du dessert ? En v’là! Le chef et proprio de la pâtisserie Crémy sur l’avenue du Mont-Royal, partage généreusement son amour des choses sucrées. Il ne suffit pas juste de parler de ses créations, il faut les montrer pour augmenter le désir. D’où la complicité du photographe Marc-Olivier Bécotte. Lui qui a étudié chez le grand Pierre Hermé, maître du macaron en France, aurait pu nous offrir des desserts de haute voltige qui nécessitent des prouesses d’exécution. Pas du tout. On est plutôt dans le domaine des friandises affriolantes, même venant de notre patrimoine sucré, tel les pets de soeurs.  Ce peut-être une tarte au citron. Et vous serez servi par sa poutine! Quoi, la poutine un dessert ? Attendez de voir. Vous avez toutes les recettes, toutes simples. Et si votre faible est le dessert, rien n’interdit de vous en gaver en cachette, même si Dieu voit tout.

Veux-tu du dessert ? En v’là! Rémy Couture. Les éditions La Presse 153p.   www.editionslapresse.ca

 

 

 


Hommage au légendaire biscuit Whippet

Pour preuve que Huguette Thiboutot tient en haute estime le fameux biscuit Whippet, elle le range au niveau du patrimoine québécois et lui consacre même un petit livre Whippet le départ d’un ami. Elle a été tellement estomaquée par le départ de sa fabrication du Québec vers l’Ontario qu’elle avait tenté précédemment de défendre sa cause auprès de la compagnie Dare. De contacter même son compétiteur les biscuits Leclerc, question de voir s’il pouvait être envisageable de reprendre la marque. Dans cette petite plaquette elle déclare son amour de ce biscuit qui lui rappelle tant de souvenirs. Et elle s’est documentée en conséquence. En effet, à la toute fin on a une bibliographie pour ceux qui voudraient faire tout le tour de la question. Jamais un biscuit n’aura reçu autant d’amour.

Whippet le départ d’un ami Huguette Thiboutot. Essor livres 27p.    www.essor-livresediteur.com

 

 

 


De l’importance du poète dans cette vie trouble

Les éditions Sémaphore mettent au monde une nouvelle collection ayant pour nom “Mobile”.  Le premier titre à paraître est une défense et illustration de la poésie comme raison d’être dans ce monde si agité. Et pour se porter garante du bien fondé de la présence de la poésie une femme de lettres anglophone mais francophile jusqu’au bout des ongles Agnès Whitfield qui présente Poète, où te tiens-tu ? Celle qui dit qu’écrire en français lui donne un espace de liberté et de lumière fait dans ces pages un long plaidoyer de l’utilité des poètes. Parce que la planète ne se comprend plus, ces magiciens de l’imagination nous aident à se placer au-dessus de la mêlée, à prendre un sain recul. Une phrase annonce la couleur “Pourquoi t’obstines-tu à tergiverser quand le présent est si impérieux”. Cette plaquette annonce des lendemains qui chantent pour cette collection.

Poète, où te tiens-tu ? Agnès Whitfield. Sémaphore coll. Mobile 127p.     www.editionssemaphore.qc.ca

 

 

 


Des oiseaux aux ours

Il était une fois un ornithologue, Rémi Huot qui tourna le dos aux volatiles pour s’intéresser aux ours. Au point d’abord son Val d’Oise pour aller vivre dans les Pyrénées-Orientales, ensuite de parcourir les forêts denses de l’Europe orientale. De pouvoir réaliser son rêve de voir l’ours dans son habitat naturel. Et quel beau frisson le parcourt quand il peut voir une affiche alertant de la présence d’ours. Ce qui pourrait en faire frémir plusieurs, le comble. Il raconte donc cette passion Dans les forêts de l’ours. Il nous raconte sa quête de la bête à la façon d’un polar. Par exemple, il y a ce moment où il sent une agitation particulière près de sa tente. Ça y’est se dit-il, voici un ours curieux. Il ouvre rapidement l’entrée pour apercevoir plutôt un gros cerf. Le verra t-il enfin son ours ? Nous ne vous en diront pas plus afin de ne pas gâcher votre plaisir. A travers ces pages il y a aussi ce plaisir partagé d’un amant de la nature. Il rend bien compte de ce qu’il voit et ressent. L’appel des grands espaces a toujours quelque chose de séduisant.

Dans les forêts de l’ours Rémi Huot. Le mot et le reste 146p. 

 

 

 


Un roman gay écrit à quatre mains par deux femmes

Selon une statistique très conservatrice, on estime à dix pour cent le prorata du pourcentage de gays et de lesbiennes sur notre bonne vieille terre. Ça fait pas mal de monde même à ce chiffre. Et pourtant la la littérature ne reflète pas par son ampleur ces amours qui n’osent souvent encore dire leur nom. Il est vrai que l’homosexualité connaît en occident une phase de tolérance, non d’acceptation. Ce préambule pour souligner l’arrivée d’une tendre histoire d’amour entre deux jeunes hommes Branché sur toi qualifié comme un boys love par leurs deux auteures Janney Deveault et Sophie Vaillancourt. Une certaine logique aurait voulu qu’elles narrent d’abord les amours de deux femmes. Mais non, elles ont su investir avec talent les sentiments qui peuvent habiter deux gars, si dissemblables, un chanteur, Nathaniel, altruiste comme il ne s’ern fait pas à l’ère numérique du chacun pour soi et Aidan un misanthrope qui n’a pas trop envie de se lier avec la gent humaine. N’a-t-on pas dit que les plus belles histoires commencent par un non ? C’en est une très belle qui nous est offerte, écrite avec brio.

Branché sur toi Janney Deveault et Sophie Vaillancourt. Luzerne Rousse 368p.    www.luzernelarousse.com

 

 

 


William Sheller à un  seul exemplaire

Quand on dit à un seul exemplaire, ce n’est pas le nombre de copies de son autobiographie William que vendra William Sheller mais bien en référence à la personnalité en un seul exemplaire de cet artiste unique auteur-compositeur-interprète, qui s’il est un peu méconnu au Québec, mérite le détour ne serait-ce que pour nous avoir offert un livre totalement sans filtre où il parle de sa recherche du père, dont il apprendra que son véritable, biologique, est un américain, sa bisexualité découverte au hasard d’une promenade nocturne, de sa consommation de cocaïne. C’est notre recherchiste accro à la quotidienne de C à vous en France qui avait entrevu le passage de Sheller venu défendre son bouquin. Il a un peu de ressemblance avec le regretté Jean-Pierre Coffe, mais une autre affinité, le franc-parler. Qui le dit sans ambages, n’a plus rien à cirer sur la façon dont se comporte l’industrie musicale maintenant, et qui a tiré un trait de tout ce qui l’a retenu avec le monde de la musique, son piano compris. Il s’est mû en brillant philosophe avec pas mal de certitudes. Il est brut de décoffrage. Nous avons surtout aimé le personnage, ce qui n’exclut pas à la suite de cette lecture d’aller à la découverte de sa musique. Au vu de la photo de lui enfant sur la couverture, c’est un rappel qu’on ne se débarrasse jamais de son enfance. Nous vous invitons à revoir sur les réseaux sociaux l’entrevue accordée à C à vous. Il est à parier que vous allez vous précipiter pour vous procurer cette histoire de vie à nulle autre pareille. Même s’il a quitté la musique, l’histoire de sa vie nous démontre qu’il est capable de nous divertir encore mais autrement.

William par William Sheller. Équateurs 488p.   www.editionsdesequateurs.fr

 

 

 


Une héroïne de la résistance néerlandaise

Les grandes vies il ne faut pas aller chercher du côté des paillettes ou des réussites financières, mais plutôt du côté d’anonymes, hommes et femmes qui se sont sacrifiés pour une grande cause. Et l’Holocauste est un terreau incroyable d’histoires émouvantes d’individus qui ont tout risqué pour préserver la liberté de leur nation. C’est le cas de Selma van de Perre, une juive néerlandaise qui a prêté son concours à la résistance locale. Quand on dit risqué sa vie, c’est un euphémisme. Nous aurons toujours en mémoire cette horrible histoire de trois jeunes filles capturées par la Gestapo de Limoges qui furent plongées dans l’eau bouillante, ensuite dans de l’eau glacée et les extrémités travaillées au charbon ardent. Les témoins, dont un canadien, n’ont jamais pu extraire de leur mémoire les hurlements de ces pauvres victimes. C’est ce genre de traitement que risquait de subir notre héroïne qui a aujourd’hui 98 ans, est de fait une des dernières survivantes du sinistre camp de Ravensbrück. Car “heureusement” pour elle, elle ne sera pas torturée mais conduite dans ce dernier camp. Elle avait maquillée son identité juive pour prendre le nom de Margareta van der Kuit avec comme diminutif, Marga.  Dans Mon nom est Selma, elle revient sur ses années d’horreurs. Où l’Homme se montre du meilleur comme du pire. Dans le genre, il n’y a jamais de mauvais livre. Chaque témoignage de ce style est une pierre à l’édifice de la connaissance humaine. A vous d’en conclure le bilan.

Mon nom est Selma Selma van de Perre. Alisio  268p.   www.alisio.fr

 

 





 


Le coin santé physique et psychique (1)

La “pandémie” de la Covid-19 a déjà engendré une assez bonne production livresque où chacun tente d’apporter son explication. C’est souvent à cette enseigne que l’on trouvera de l’information pertinente que l’on ne trouve plus dans les médias, inféodés au système de santé et qui n’en sont devenus que les hauts-parleurs. A peine commence-t-on à lire quelques critiques mais c’est d’une voix timide. Bref. Dans un autre registre, le théoricien québécois bien connu du management Alain Samson s’invite dans la danse en tentant de répondre à ce questionnement que nous nous posons tous à savoir quel sera Le leadership postpandémie aux éditions de sa Société-conseil Alain Samson. C’est évident que nous connaissons un changement de l’ordre du monde. Et que même si on ne sait pas où tout ça va nous mener, il est assuré que ce ne sera plus pareil. Dans ce livre, il s’adresse au patron. Ça change la donne le télétravail. Un chapitre nous a particulièrement intéressé, déjà le titre “De boss des bécosses à coordonnateur hors pair”. Il exhorte petits et grands à cesser l’autorité à la verticale mais à lâcher un peu de lest et permettre aux employés de pouvoir innover”. De quoi alimenter toute une réflexion patronale.

Aux éditions du CRAM c’est Anne-Cécile Hartemann qui présente Métamorphose dont le sous-titre “Le courage d’aller vers soi” donne le ton au contenu. Dans l’histoire de cette française d’origine qui a posé ses pénates à Montréal il y a eu une rupture, celle d’avec son conjoint, de surcroît père de ses enfants. Qui dans l’ordre des traumatismes psychiques vient en presque tête de liste. Elle aurait pu s’effondrer et se remettre négativement en question. Pour reprendre le cliché bien connu, ce qui ne tue pas rend plus fort. Elle a donc relevé les manches et pris son destin en main. Aujourd’hui elle est thérapeute en relation d’aide et enseigne le Hatha Yoga. Dans son traité de l’amour de soi, elle fait intervenir tous les grands concepts existants de thérapies. Cela a le mérite de vous éviter de faire trente lectures. Tout s’y trouve pour trouver la paix dans son coeur et pas ailleurs comme chanté magnifiquement par la regrettée Renée Claude.

La vieillesse comme un privilège, ce n’est pas un message qu’on entend très souvent dans la civilisation occidentale obnubilée par l’âgisme et où on tente par tous les moyens de repousser les marques du temps. Et pourtant c’est le discours que tient la gérontologue sociale Diane Baignée spécialiste aussi du deuil. Dans Les p’tits vieux...c’est les autres! l’éditeur Michel Lafon, elle oppose un sérieux démenti au général De Gaulle qui prétendait que la vieillesse est un naufrage. Curieusement elle ne s’attarde pas trop comme tel au phénomène de l’âge, mais surtout de détricoter tous les a priori qui entourent le sujet. Et elle ne néglige aucun aspect. Exemple: il est question entre autres du vieillissement chez les homosexuels. Une fois qu’elle a balayé de la sorte tous les préjugés, on est à même de voir la vieillesse pour ce qu’elle est. Et un fait qui nous a amusé c’est qu’elle reprend sans le savoir un mot de l’humoriste Dominique Michel qui disait que si on est vieux con, on risque de le devenir plus avec l’âge. Et la gérontologue de déboulonner l’association entre vieillir et sagesse. Cette lecture essentielle enlèvera un poids considérable sur les épaules de ceux qui croient qu’être vieux est une malédiction.

Chez Alisio une étude fondatrice à parcourir concernant les patrons Mon chef est un boulet de Thomas Erikson. Nous avions et nous avons toujours un parti à la rédaction que tous les patrons n’ont cure de leur personnel, ces employés tellement embarrassants. Si on pouvait les remplacer par des robots. On voit d’ailleurs leur grand intérêt à investir dans l’intelligence artificielle. Un robot ça ne réplique pas. Erikson lui, fait plus dans la nuance. Il brosse un tableau des chefs d’entreprise, répertoriés en quatre catégories représentées par une couleur: vert, jaune, bleu et rouge. En fait, il reprend un concept élaboré avant lui par William Moulton Marston dans ce que dernier a présenté comme le modèle DISA. Cet essai tr à l’américaine, utilise les cas vécus pour illustrer le propos. Est-ce que cela fera gagner plus d’empathie pour les patrons ? A vous de juger.

Si vous ne le saviez pas encore, tout dans l’anatomie humaine est interrelié. Le psychiatre suédois Anders Hansen n’en pense pas moins et le fait savoir dans Bougez votre corps pour un cerveau plus fort. Où il fait la démonstration que l’activité physique agit sur la qualité des neurones. Si vous faites dans l’âgisme par exemple, il est écrit que l’exercice physique contribue à lutter contre le stress et freiner le vieillissement. Et qu’on ne peut trouver meilleur antidépresseur. Il constate que si le niveau d’échec scolaire est tel en occident c’est qu’on n’intègre plus d’activités sportives chez les jeunes, au contraire des pays asiatiques qui connaissent et de loin des niveaux performants chez leurs élèves pour l’intelligence d’avoir conçu des programmes éducatifs incluant le sport. Ils ont compris la fameuse devise du Comité international olympique “men sana in corpore sano”, un esprit sain dans un corps sain, tout simplement.  C’est publié aux éditions Marabout. Un ouvrage que devrait lire notre ministre de l’éducation.

 

 





 


Le coin santé physique et psychique (2)

Aux éditions Signées JM deux titres. Le premier de Julie Deblois Regarder devant” préfacé par l’animatrice Geneviève Borne est un récit de résilience. A la ville elle est copropriétaire d’une  entreprise qui conçoit des cadeaux corporatifs haut de gamme. Elle est l’incarnation de l’adage qui dit qu’un malheur ne vient jamais seul. Déjà aide soignante auprès d’un conjoint, il y a eu par la suite le décès de son père et en prime l’annonce de son cancer. Pour moins que ça il y en a qui plongent dans des abîmes de détresse.  Surtout pas une superwoman, elle va même craquer, mais aussitôt pour prendre la vie à bras-le-corps. Un ouvrage inspirant pour ceux qui ne parviennent pas à se sortir d’une vie tourmentée.

L’autre livre Dépassée à épanouie de Stéphanie Labonté va un peu dans le même sens que le précédent. Dans son cas, c’est une relation trouble de nature alimentaire. Elle a un surpoids qui l’embête et qui mine son estime de soi. Elle aura l’aide d’une psychologue. Cette criminologue et intervenante psychosociale en santé mentale se raconte également, et comment elle a réussi à surmonter sa spirale infernale. Geste altruiste de sa part, elle a décidé de consacrer 2$ sur chaque exemplaire vendu à l’organisme Anorexie et Boulimie Québec. 

 

Signalons cette fois un ouvrage d’une grande utilité publique car il s’adresse aux mères monoparentales, hélas trop nombreuses au Québec. Cela rappelle une anecdote concernant un de nos co-éditeurs qui voulait contacter le directeur du quotidien Le Devoir, qui fit dire par sa secrétaire qu’il n’était pas joignable car trop occupé. Et notre patron de lui répondre par une gifle épistolaire en rappelant le sort des mères monoparentales qui elles aussi peuvent prétendre être autrement plus occupées qu’il ne l’est.  Et c’est si vrai, déchirées qu’elles sont entre le boulot, la garderie, les devoirs, la préparation des repas, et tout le train-train domestique. De quoi perdre l’équilibre. Nina Farr elle-même dans cette situation et maman de deux enfants, est conférencière et dispense son expérience et comment ces mamans peuvent apprivoiser leur situation. On dit qu’il y a trop de livres. Curieusement, pas tant que ça sur la question des mères célibataires. Maman solo est publié aux éditions de Mortagne.  

 

Voici une étude qui tombe à point nommé alors que les restrictions sanitaires gonflent les cas de dépression et d’anxiété dans la Belle Province, le remède s’avérant pire que le mal. A ceux qui sont en perte d’équilibre, la psychologue clinicienne Lucie Dufour s’amène avec Pourquoi suis-je anxieux, déprimé et irritable ? aux éditions du Dauphin Blanc. Elle passe en revue tous les symptômes selon les différentes personnalités. Son expertise, forgé de ses consultations en cabinet lui valent l’estime de collègues qui n’ont pas hésité à témoigner de la valeur de ses constatations et les méthodes offertes pour soigner ces maux de l’âme et de l’esprit.

 

Nos aïeux le savaient déjà, eux qui disaient qu’on attire ce qui nous ressemble. Manière simpliste d’affirmer que l’on était un peu maître de son destin. La loi de l’attraction de Paige Oldham qui a bossé dans le monde des affaires ne dit pas autrement. Elle vit maintenant dans le décor champêtre de Colorado Springs. Entre parenthèse, nous avons souvenance à la rédaction d’un gars sur le plateau de l’émission de Denis Lévesque, qui se disait convaincu qu’il allait gagner à la Loto. Finalement cela se présenta deux fois plutôt qu’une. Le contraire c’était ce grand-père d’un de nos collaborateurs, qui lorsqu’il faisait beau, lançait “ouais mais demain il va pleuvoir” incapable de profiter de l’instant présent. Il réussit finalement à attirer le mauvais sort. Madame Oldham livre ses visualisations qui permettent d’orienter le futur vers soi, et de façon favorable. C’est aux éditions Le lotus & l’éléphant.